Les planètes amies (5/5)
Message du Professeur Zolmirel (fin)
Une autre image surgit sur l'écran. La seconde moitié du vaisseau, assemblée dans une base près de la mer, allait décoller elle aussi. Nous avons assisté à l'incroyable transformation du navire en matière-énergie. Je constatais que le hangar semblait encore plus vaste que le nôtre. Cette fois, le navire avait été assemblé par de nombreux mécaniciens Ilstirr, et quelques Galmols des montagnes au teint saumon, comme Zilmis. Plusieurs aliens de nuit étaient chargés de replier les grues et les cales géantes qui stabilisaient le navire. Cette fois, la fosse était éclairée par de belles lampes dorées. Une ancienne très âgée bénit le navire et tous ceux qui avaient participé à sa création.
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Il sera bien là haut, émit-elle en un murmure mystique.
De nombreuses prières et paroles de remerciement fusèrent. Bien que le chantier soit situé à plusieurs centaines de kilomètres du nôtre, je ressentis de même une énergie intense, qui crépita autour de moi en un frémissement électrique plaisant. Le vaisseau s'illumina, et ses réacteurs gagnèrent en puissance. Il se dressa de manière presque verticale cette fois, et devint entièrement doré. Puis il s'éclaira de blanc, un flash intense suivit et il disparut. Il venait de franchir l'improbable muraille de pierre !!!
Nous étions inondés d'un bonheur infini. Les deux moitiés du vaisseau apparurent alors sur une partie du grand écran. Le géant cosmique était escorté de nombreux vaisseaux légers avec à leur bord des experts, chargés de surveiller et d'anticiper toute panne éventuelle. Voici bien longtemps, ce procédé n'était pas encore au point, un vaisseau était de la sorte retombé, et il avait fallu les efforts conjoints de centaines d'aliens pour le stabiliser, évitant un impact redoutable.
A présent, les deux moitiés du vaisseau étincelant progressaient à vive allure, entrant dans les nuages. Il s'approcha, atteignant les dernières frontières stratosphériques, juste avant son éjection orbitale. Alors, la plupart des navires escorteurs firent demi-tour, la majorité n'étant point conçus pour aller dans l'espace.
Les agents de remorquage à bord du géant, étaient occupés à sortir poulies, rails, et leviers magnétiques, qui allaient permettre aux deux moitiés du vaisseau de s'arrimer sans heurts. Plusieurs petits vaisseaux attendaient, tout près du chantier spatial, situé près d'un jeune astéroïde.
Ce serait là que le navire serait achevé, tout près du monde où vivait Esvar, le frère d'Amoni et son épouse Minvela, ainsi que leurs deux enfants.
Des experts Ilstirr attendaient l'arrivée du géant. Ils lancèrent des câbles, afin de le stabiliser, et le navire fut remorqué jusqu'à un vaste hangar. Là, il décéléra.
L'écran montrait maintenant une image unique qui resta à jamais gravée dans mon cœur. Le superbe hangar ressemblait à un berceau de lumière. C'était là que le géant allait être achevé. Des centaines d'aliens graciles couraient sur les parements pour raccorder les câbles, fixer les rails de soutien et les montants des blindages. Des petits clones d'une souplesse merveilleuse raccordaient les tuyaux, les gaines de chauffage, les circuits d'énergie et de ventilation à l'aide de repères colorés, comme cela avait été prévu.
Nous sommes restés longuement à deviser, muets de ravissement face à tant d'habileté conjointe. Nerti réprima ses larmes en avisant les clones occupés à souder avec précision des centaines de câbles avec une sorte de frénésie.
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Ne t'en fais pas mon cher petit. Sur notre monde, les jeunes clones sont aimés et admirés pour leur travail. Ils vivent en famille. Tu peux être certain que chacun de ces enfants est empli de bonheur à l'idée de participer à une telle aventure, expliqua Erazel.
C'était la vérité bien sûr et lorsque l'un de ces enfants s'exprima sur l'écran, il versait des larmes de gratitude.
Nous sommes sortis de la grande salle, encore baignés par la féerie de ces instants incomparables.
Cela était arrivé ! Il était passé ! Le grand croiseur de lumière avait franchi les barrières microcristallines de la cohérence de la matière. Désormais, tout lui devenait possible. Nous étions emplis de bonheur à l'idée que tout ait pu si parfaitement réussir !
De très longs voyages adviendraient, mais aussi, des visites plus fréquentes de nos proches, qui vivaient sur des planètes amies.
Nous nous sommes installés sur l'herbe, afin de nous remettre de nos émotions, et Zilmis alla rejoindre Orel et d'autres aliens cuisiniers pour s'occuper de la confection des mets.
Une odeur alléchante monta autour de nous, lorsqu'un murmure ravi jaillit.
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Ça alors ! Quelle tête fais-tu donc ! lança une voix allègre.
Amoni se redressa et reconnut son frère, Esvar et sa famille. Fous de joie, ils s'étreignirent.
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Un petit accident de glace, précisa Amoni. C'est impressionnant, mais ces marques vont bien disparaître. Comment as-tu donc fait pour venir si vite ?
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Il faut le demander à notre jeune expert ici présent, fit Esvar en s'inclinant auprès de Nerti pour l'embrasser. Erazel m'a tout expliqué, et c'est grâce à toi si nous allons pouvoir passer plus de temps ensemble, exposa Esvar avec émotion. Tu as su relier nos deux mondes ! Bravo à toi !
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Je n'ai fait que ce que la dame m'a demandé, avoua Nerti en toute innocence. Elle voulait que je saute très loin.
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Mon enfant, à présent, nous pourrons nous rejoindre en quelques minutes !!! Cela va révolutionner l'apport en aliments, en remèdes et les visites dans tout notre quadrant. Nous pourrons désormais passer bien plus de temps avec ceux qui habitent des régions reculées ! Grâce à toi, nombre de pyramides ont rejailli et il existe des couloirs subtils qui relient les grands temples de ton monde et du mien !
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Ce sont les êtres de lumière qui ont dû tout faire, ajouta Nerti humblement.
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Ils en ont peut-être fait une partie, mais tu as fait le reste ! lança Esvar en le portant vers le ciel.
Une belle fête débuta alors, chacun rivalisant de talent pour mettre à profit les récents événements. Des musiciens Ilstirr sortirent leurs instruments. Zilmis fit goûter à tous ses spécialités et remporta un vif succès.
Quant aux êtres de lumière, ils invitèrent nombre d'habitants curieux à visiter leur navire, ce qui était bien sûr un très grand honneur.
Mais cette journée mémorable me réservait encore des surprises. Une voix malicieuse murmura à mon oreille.
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Un enfant, un petit alien très étonnant... exposa Oralecto, mon vénérable grand père, avec une ample satisfaction.
Je souris largement, constatant qu'il avait revêtu son habit de fête couleur pourpre et rose et l'embrassais.
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Ces événements sont merveilleux, émit-il. C'est une grande magie que le passage se soit révélé à lui.
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Vraiment ? Il dit pourtant qu'il est juste entré lorsque la fenêtre est apparue.
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Aucun alien n'aurait osé franchir une fenêtre menant vers un lieu de glace, il faut beaucoup de courage et un cœur très pur. Il a pu la franchir, parce qu'il voyait sa famille l'appeler, de l'autre côté, depuis un très vieux temple de lumière.
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Je ne comprends pas tout, avouais-je.
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Cela n'est pas nécessaire non plus, fit mon grand père. Nous avons souvent l'illusion que comprendre les choses est un bienfait pour notre esprit si avide de contrôler, de définir tout, mais en réalité, parfois, cela nous éloigne de la grande communion avec notre planète et ses sœurs. Toute planète se souvient du chemin menant vers les autres royaumes, les passages subtils. Elle peut réinscrire tout le séquençage originel qui lui a été alloué par les créateurs de mondes dès sa conception, afin de pouvoir échanger aisément avec d'autres planètes amies. Il suffit juste de savoir lui demander, émit-il en souriant.
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Il suffit de demander à l'esprit-mère de notre planète d'ouvrir des passages vers les mondes amis pour que cela se produise ?
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Oui, et la raison profonde se passe de toute discussion, émit Oralecto en fixant Zilner qui s'amusait à poursuivre les enfants d'Esvar et Minvela, deux petits aliens au teint bleu, tout aussi espiègles que Nerti.
Je réalisais toute la vérité d'une telle sagesse. N'était-ce pas pour être avec ses deux cousins que Nerti avait ainsi agi, en rapprochant nos deux familles ? Sans le réaliser pleinement, il avait restauré un ancien couloir de communication.
Je me laissais aller à une paisible contemplation, Oralecto me faisant admirer tout un lot de champignons d'une espèce nouvelle qui attira bientôt la charmante Minvela.
Notre bonheur fut bien grand ce jour là, et je songe à vous, à votre monde avec la même joie au cœur à l'idée de se retrouver. C'est ainsi que la joie et le bien être en viennent à renaître dans nombre de foyers.
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