Les semeurs de mondes (3/4)

Publié le par Aurélia LEDOUX

Les semeurs de mondes (3/4)

Message du Professeur Zolmirel (suite)

 

 

La nef décolla vers la belle de nuit encore endormie, et nous avons rapidement gagné le terminateur. Là, les voiles de la nuit cédaient le pas aux douces brumes de l'aube qui montaient sur une vaste plaine de glace. J'avisais plusieurs volcans à la lave qui formait des incandescences rosées. Le spectacle était à couper le souffle, et je ne formulais plus la moindre objection quant à notre tenue.

 

Le vaisseau se posa avec légèreté sur la glace, aussitôt Erazel déploya les senseurs longue portée.

 

  • Rien à l'horizon, dit-elle. Nous avons vingt minutes. Ensuite, ce sera couvert, très couvert.

     

Orel et Dorian sortirent aussitôt de la nef et disposèrent des perches de reflux, de simples piquets, qui bloquaient les effets du vent pour nous protéger des bourrasques.

 

Chacun de nous descendit de la nef, en portant avec lui de jeunes plants de champignons, et de plantes salines. Ces plantes possédaient de curieuses petites feuilles arrondies et boursouflées d'un rose grenadine tirant sur le mauve par endroits. Elles étaient très dures et leur système racinaire, fort profond, imposait de creuser la glace à un mètre au moins.

 

Je frémis en avisant le paysage de hautes montagnes dans le clair obscur, bleu pâle en cette heure. Notre action était combinée avec les effets du soleil levant de cette contrée, qui permettrait aux frêles petites plantes de s'enraciner comme il faut.

 

Erazel creusa une vingtaine de trous en un éclair, à l'aide d'une carotteuse à antigravité. Elle déposa les cylindres réguliers à côté des plants et attendit que chacun de nous agisse.

 

Les enfants, très habiles, émiettèrent le sable et la poudreuse au pied de chaque plant, dont les racines allaient progressivement générer du sel pour capter l'eau sous forme liquide.

 

De mon côté, je m'affairais à positionner un gros champignon gris peu engageant, au chapeau piqueté de petites taches noires irrégulières. Il était aussi dur que de l'écorce. Si tout allait bien, il donnerait une moisissure épanouie de 20 mètres de haut, et permettrait à des algues glaciaires de se développer à son pied. Zilmis disposa de jeunes algues près des champignons, et Erazel nous informa que des lacs acides avaient reçu le même traitement.

 

  • Vous voulez dire que les algues ne sont pas affectées par l'acidité, ni les animaux ? m'étonnais-je.

  • En effet, il semble en être ainsi. Après tout, l'estomac de nombreuses espèces secrète de l'acide. Le boire ne semble donc pas un obstacle.

 

Nous avions presque terminé nos plantations. Amoni et Zilmis disposèrent les dernières plantules, puis, notre attention fut attirée par un point brillant à l'horizon.

 

  • Qu'est ce donc que ceci ? demanda Amoni.

  • Ne traînons pas, fit Erazel, partons vite d'ici.

 

Les enfants fixaient eux aussi le point brillant, il commençait à neiger et la luminosité diminua fortement. Je fis agir mon fluide pour réunir seaux et coupelles et filais ramener tout le matériel à bord. Les enfants firent de même, Amoni attentif à ne pas les perdre. La lueur intense du vaisseau était à peine visible dans la neige épaisse. Nerti trébucha et Minel le releva aussitôt. Orel et Dorian se chargèrent des derniers appareillages et aidèrent notre groupe à regagner la nef. Je peinais dans la neige, aidant Zilmis à charger l'appareil de carottage. Les êtres de lumière récupérèrent les perches de reflux, et revinrent à bord. Un épais blizzard se mit à tourbillonner.

 

  • Impossible de décoller, murmura Erazel, en frissonnant et en retirant sa combinaison. Nous sommes à la merci.

  • Plaît-il ? Vos avez l'habitude de passer outre ce type d'obstacle, alors qu'en est-il ? demandais-je à voix basse.

  • Très simple, un navire non répertorié. Il semble nous avoir détecté. Si je décolle, je risque de heurter la montagne à cause de la tempête, et nous serons détectés. Ce blizzard couvre notre trajectoire. Je vais longer le fond de la vallée, de cette manière, nous pourrons nous éloigner discrètement.

 

Erazel mit son plan à exécution, les enfants encore occupés à faire tomber la neige de leurs habits dans le sas. Amoni apporta des couvertures chauffantes à tout le monde et distribua des boissons chaudes.

 

  • Il était moins une, soupira-t-il. Il semble impensable qu'ils survivent ainsi.

  • Ils aiment la neige, exposa Dorian. Il existe une incalculable variété de formes de vie.

  • Je me demande bien quel est cet étrange objet brillant qui était visible à l'horizon, questionna le petit Nerti.

  • Un vaisseau, répondit Orel.

 

Dorian lui jeta un regard réprobateur, et il comprit qu'il en avait peut-être trop dit.

 

  • Quel type de vaisseau ? questionna un Amoni soupçonneux.

  • Peu porté sur la conversation, éluda Erazel. Nous allons nous cacher et attendre.

 

 

Alors, elle prit un peu d'altitude et posa la nef près d'une haute crevasse, avec un immense pont de neige qui était visible non loin de notre position, en contrebas. Nous nous trouvions sur un haut plateau donnant sur une vaste plaine immaculée visible à perte de vue.

 

  • Nous sommes invisibles, émit-elle sereinement, en débranchant tous les systèmes énergétiques, à l'exception du chauffage. Cependant, ils pourraient nous entendre. Je vous propose de nous reposer.

 

Chacun alla donc s'étendre en sa chambre, les enfants peu enthousiasmés par la perspective de dormir, alors qu'un navire inconnu tentait de sonder notre position. Amoni s'étendit, serrant le petit Zilner contre lui, et entourant Nerti et Minel de son autre bras.

Tout autant impressionnés, Zilmis et moi-même nous sommes blottis l'un contre l'autre, tentant de nous faire tout petits.

 

 

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