Le croiseur héroïque (1/4)

Publié le par Aurélia LEDOUX

  Le croiseur héroïque (1/4)

Message du Professeur Zolmirel

 

 

Je reviens vers vous mes chers amis en ces précieux instants.

 

Nous nous trouvions ma famille et moi à bord du croiseur héroïque, baptisé le Yogotsima. Cela se traduit approximativement par « sillon de lumière dans l'espace ».

 

Après un long somme, nous étions éveillés, frais et dispos. Le navire avait gagné en vitesse. Il grinçait régulièrement.

 

Il s'agissait d'un navire fort ancien, rapiécé de toutes parts. La proue était anormalement imposante, par rapport au fuselage étroit, dont une bonne partie manquait. Erazel, qui nous accompagnait, avait le souhait de visiter le vaisseau, pour en renforcer toute la structure. Tout cela bien sûr, aussi discrètement que possible, pour ne pas froisser nos hôtes.

 

Il nous avait été fait le meilleur accueil qui soit. Très fier de son bâtiment d'âge immémorial, le capitaine était heureux d'éclairer notre curiosité.

 

  • C'est un des plus anciens et des plus illustres vaisseaux de mon peuple, les Denakhs, nous dit-il. Il était là lors de la Grande épopée, vers les nouveaux mondes, voici 8 millions d'années. Bien sûr, à l'époque, ce navire était bien plus grand. Sa taille d'origine est d'environ 700 mètres de long. La structure originelle a été préservée en grande partie. Des rampes en titanium ultra ont été posées un peu partout au fil des âges pour consolider la structure porteuse en cuivre amélioré.

  • Vous avez admirablement rénové ce bâtiment, souligna Amoni, toujours admiratif des beaux endroits.

 

Il faut dire que nous nous trouvions en un salon douillet, qui comportait aussi une table accueillante dans un espace réservé aux repas.

 

  • Cela a été un long et patient travail, exposa un autre alien aimable, le second du capitaine. Il nous a fallu vivre au milieu des poutrelles et continuer à apporter une vie agréable aux enfants.

  • Oui, c'est bien vrai, ajouta l'épouse du capitaine. C'était parfois difficile. Nous avons réussi à trouver beaucoup de pièces détachées. Et maintenant, ce navire a été pressenti pour renaître. Il a été choisi par les êtres de Lumière pour participer à la Grande Traversée. L’astéroïde vers lequel nous nous dirigeons comporte une base avec un centre de maintenance pour les vaisseaux antiques.

  • C'est un grand honneur, souligna le capitaine. Nous y sommes vraiment beaucoup attachés. Les êtres de Lumière nous ont proposé de nous emmener sur Thamnoth ! Vous rendez-vous compte ? C'est exceptionnel. Comme nos ancêtres l'ont tant de fois rêvé avant nous, nous aurons la possibilité de revoir la Belle oubliée !

  • Ca bien long et fabuleux voyage, souligna Minel.

  • Oui, très long, commenta Erazel en fixant le moins farouche des enfants, qui nous observait, caché derrière une cloison. Peut-être avez-vous eu vent de ce qu'il advenait des habitants de Thamnoth. Avez-vous gardé le lien ?

  • Oui, il existe des liens ténus, exposa le capitaine. Les plus grands prescients et télépathes voient ce qui advient là-bas. C'est un monde très différent du vôtre, qui est habité par la verdure et la joie. Sur Thamnoth, rien ne pousse. Les habitants originels, les Gzokis, se sont réfugiés dans les profondeurs de ce monde. Nous aimerions leur apporter l'espoir, les aider à restaurer le bonheur entre eux. Ce sont nos frère et nos sœurs lointains.

 

Ces paroles nous absorbèrent tous. Il était peu des miens qui avaient étudié les Gzokis. Je savais simplement qu'il s'agissait d'un peuple de scientifiques, et qu'ils différaient des Denakhs que nous connaissions, bien plus grands et aimant à discuter.

 

Sur mon monde à cette époque, il était une importante délégation Denakh. Nous les considérions comme des amis et des invités. La plupart cherchaient alors à mettre un terme au système des castes. Il s'agissait d'aliens de haute pensée, ayant de grands idéaux pour leur peuple. L'alliance entre nos deux mondes s'était renforcée. Les Denakhs nous avaient confié un grand nombre de déchets de métal, qu'ils ne parvenaient pas à démoléculariser.

 

Cela était une de nos spécialités. En échange de ce service, ils nous avaient offert un long courrier héroïque. Une équipe d'experts des deux mondes travaillait à sa restauration. C'était un fabuleux travail, un défi heureux, et un inestimable partage de connaissances.

 

Le capitaine était au courant de sa restauration.

 

  • Vous êtes très bons d'accueillir en vos grottes les deux moitiés de ce long courrier. Il a une immense valeur pour notre peuple. Les experts Denakhs peinent à le restaurer, car la pâte thermale est trop ancienne. Ils disent que sa conscience originelle, que l'esprit de ce vaisseau s'en est allé.

  • Qu'est-ce donc que la pâte thermale ? demanda Limmel avec curiosité.

  • Il s'agit de l'étincelle originelle du vaisseau, celle qui fait le lien avec toute sa structure, qui conscientise la matière. La pâte thermale siège dans les réacteurs, elle permet de maintenir en vie la conscience du vaisseau. C'est un corps très mystérieux, dont nous parlons peu sur notre monde : le plasma, émit le capitaine avec difficultés. Cela est lié au grand tabou. Les scientifiques Denakhs craignent ce qu'ils ne peuvent comprendre pleinement, et le plasma en fait partie. Il échappe à toutes les équations, ajouta-t-il courageusement.

  • Et d'où vient-il ?

  • Du cœur des aliens, émit le capitaine avec difficultés.

 

Chacun de nous n'insista point, comprenant que ce sujet était sensible. Le capitaine et sa famille prirent congé, nous laissant nous reposer. L'appontage était prévu pour bientôt.

 

  • Je suis vraiment intrigué par ce plasma, exposa Amoni.

  • Il est très difficile d'en savoir plus à ce sujet, répondit Erazel. Certains Denakhs semblent en mesure de projeter leur fluide vital à l'intérieur de la matière inerte pour lui insuffler la vie. Tout comme nous, nos amis Denakhs sont très énergétiques, fit-elle en contemplant Minel avec affection.

  • C'est fascinant, considéra Zilmis. Cela semble en effet une possibilité heureuse, tout comme les nôtres placent un cristal géant au cœur des vaisseaux pour les conscientiser. Cette conscience des vaisseaux est essentielle. Les navigateurs et les pilotes y sont parfaitement reliés, ils ressentent toute la structure comme une extension de leur propre corps.

  • Tout cela est très juste, ajouta Erazel. Lorsque je pilote ma nef de prédilection, cela fait comme un accord parfait entre nous. Le vaisseau réagit aux moindres oscillations, grâce à la conscience présente en lui. Les experts savent aussitôt comment agir avant que ne survienne une panne.

 

Tout cela était la parfaite vérité. Une panne dans l'espace pouvait être dramatique. Aussi, ce lien avec un vaisseau, en particulier un long courrier, permettait de tout anticiper.

  • Et malgré cela, il existe toujours des imprévus, fit Erazel en riant. Sinon, où serait l'aventure ? demanda t-elle en nous faisant un clin d’œil. Le capitaine a consenti à ce que je « visite » la zone de maintenance. Quelqu'un est-il volontaire pour m'accompagner ?

 

Chacun de nous ne souffla mot, toujours impressionné par notre si sage ancienne, à la fois grave, et allègre, comme en cet instant. Nous sentions que ce ne serait pas de tout repos. Je me dévouais avec Zilmis, Amoni et Minel désirant demeurer seuls, de toute évidence. Limmel, un peu effrayée, préférait demeurer en nos appartements.

 

 

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