Le jour le plus attendu (6/6)
Message du Professeur Zolmirel (fin)
Au matin, nous étions si joyeux, que des perles de lumière nous suivaient à chacun de nos pas.
Je me félicitais de mon reflet incontestablement plus jeune dans le miroir. C'était là l'un des effets de l'amour sur mon monde. La fusion est si forte qu'elle régénère entièrement nos corps.
Nous avons fait nos adieux à nos différents invités, à Esvar et sa famille, et à tous les autres, certains de les revoir bientôt.
Les enfants n'étaient pas encore éveillés. Orel et Dorian effectuèrent leur gymnastique matinale, et Zilmis et moi-même sommes partis nous occuper du potager.
Notre fusion, brillante et intense, se poursuivit tout le jour durant, à chaque frôlement de nos mains.
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Je suis tellement heureux, exposa Zilmis. Cela fait comme un rêve. Tes parents ont l'air d'avoir beaucoup conversé.
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Je suis très heureux de tout ceci également. Ces jours sont une nouvelle voie lumineuse, il y a tant de bonheurs nouveaux que je découvre !
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Sois rassuré, me confia-t-il. Je ne suis pas triste qu'ils aient préféré demeurer en dehors, avoua-t-il en songeant à ses parents. Cela est préférable ainsi.
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Oui, cela est peut-être mieux. Il faut que chacun choisisse sa voie. Ils nous rejoindront peut-être le moment venu.
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Oui. Le souci est que l'on a déversé en eux une fausse science de l'être et du paraître. Ils sont à présent les esclaves de cette idéologie qui corrompt les esprits.
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Je me vois ravi que tu aies échappé à cet endoctrinement.
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Il est incroyable que les cérémonies matrimoniales soient si simples ! En ma région, les époux doivent faire beaucoup de promesses, ils doivent s'engager à nombre de choses très importantes, prendre soin de la famille, de leurs futurs enfants.
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C'est déjà ce que nous faisons, répondis-je, prendre soin les uns des autres est très important, que l'on soit parents, époux, étrangers ou amis. L'amour est simple, à quoi servirait-il de répéter tout cela ? La cérémonie est surtout une prière, une bénédiction collective pour protéger l'avenir du futur couple.
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En ma contrée, c'est plutôt une proclamation à caractère social, expliqua Zilmis. L'époux présente sa compagne à sa famille, et celle-ci doit s'engager à la servir entièrement. L'épouse doit obéir en actes et en pensée à son mari. Plus elle est richement parée le jour de la cérémonie, plus cela est une fierté pour sa famille.
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Telle une reine un seul jour de sa vie, telle une servante ployant sous des tâches ingrates tous les autres, philosophais-je. Pourquoi cette contrée craint-elle l'esprit des épouses, des filles et des mères ? Pourquoi les androgynes sont-ils persécutés ? Voilà qui ferait nombre de magnifiques ingénieures stellaires, des astrophysiciennes, des navigatrices, des botanistes, des géophysiciennes, des scénaristes merveilleuses ! Que de talent gaspillé à œuvrer en cuisine, alors que le génie de la gastronomie ne leur est même pas accordé !
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Il est vrai, répondit Zilmis, sentant poindre quelque redoutable colère en moi. Peut-être pour cette raison justement. Il est des êtres qui se plaisent à dominer autrui. Contrôler la gent féminine fait partie des attributs des mâles des montagnes depuis tant de siècles, que la fin de cet esclavage les effraie au plus haut point.
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Ce n'est parce qu'une chose est injuste et perfide qu'elle doit le rester. Il faut que cela change ! protestais-je avec vigueur.
Zilmis ne dit mot, quelque peu effrayé. Nous sommes sortis au jardin et une Erazel fort joyeuse vint à ma rencontre.
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Déjà marié, et déjà brandissant l'étendard de la libération pour les femelles recluses des montagnes ! jubila-t-elle.
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Il est trop d'injustice en ce servage navrant. Ne ferez-vous donc rien ? Pourquoi tant de perfidie ?
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Les mâles dominent les aliens femelles en ces provinces, parce que cela leur est confortable. Ils redoutent cruellement l'épluchage des tubercules. Le lavage des souliers et des habits les épouvante. Un balai leur inspire la plus grande terreur, et ils partiraient en courant, si on leur demandait de consoler un petit alien en larmes ! lança Erazel avec une sorte de férocité allègre.
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Impensable ! Un alien convenable se doit de savoir œuvrer en cuisine, et officier à tous les nettoyages nécessaires d'une demeure ou d'un vaisseau. Prendre soin des enfants est une tâche dévolue aux deux parents et à la famille.
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Oui, ici, tout le monde pense ainsi. Mais Zilmis a raison, poursuivit-elle. Encore plus que cela, ils redoutent que leurs épouses sortent, aillent où bon leur semble et les laisse pantelants à la cuisine et au repassage, pendant qu'elles étudient au microscope. Plus que tout, c'est le fait que leurs filles, leurs mères, leurs sœurs et leurs épouses prennent la plume qui les terrifie. Plus que l'indépendance du corps, c'est la libération de leurs esprits qu'ils redoutent, philosopha sagement Erazel.
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Que pouvons-nous faire ? Nous devons les aider, exposais-je.
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Cela est déjà fait. Beaucoup de femelles ont fui cette région. Nous les aidons régulièrement, et elles deviennent chercheuses si elles en ont le souhait. A présent, tranquillisez-vous et profitez du bonheur qui est vôtre. Ne vous sentez pas coupable. Vous le méritez. Même si vous n'avez pu libérer qu'un seul Zilmis, tous les autres suivront tôt ou tard.
Je m'apaisais face à son regard brillant et au son de sa voix. Plus que moi, Erazel avait su déceler l'origine de ma colère. C'était un fait, je me sentais indigne par instants, en songeant aux femelles des montagnes tristement recluses en une vie d'obéissance.
Je m'apaisais en songeant que des possibilités riches s'ouvriraient désormais à celles qui en formulaient le vœu. Nous avons quitté le jardin et nous sommes dirigés vers les senteurs si attirantes de la forêt. Une longue promenade était toute indiquée.
Je vous souhaite de vivre pareils mémorables instants, chers amis de la Terre bleue. Songez qu'une brillante lumière s'étend désormais tout au dessus de votre monde, songez-y et de nouvelles possibilités heureuses viendront aisément se poser en vous. Soyez bénis entre tous pour votre lecture.
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