Le vaisseau en péril (3/3)

Publié le par Aurélia LEDOUX

Le vaisseau en péril (3/3)

Message du Professeur Zolmirel (suite et fin)

 

Nous sommes revenus à la salle des célébrations par un autre chemin, afin d'admirer un vaisseau argenté flambant neuf, en forme de disque. Il était si parfait que l'on eut dit qu'il venait d'être fabriqué. Cette fois, les enfants furent autorisés à en visiter l'intérieur. Je découvris avec plaisir des petites cabines douillettes, avec une salle de repos agrémentée de fauteuils rebondis, et une cuisine, qui fascina Zilmis.

 

Nous avons rejoint la jolie table qui avait été préparée à notre intention. Nerti et Zilner fixaient avec timidité deux clones de leur âge auprès de leur mère. Le repas qui fut servi ce soir là était absolument délectable. Je complimentais les officiers qui passaient à ma portée sur l'excellence de leurs travaux. Amoni, toujours curieux, contemplait un écran qui montrait les différentes étapes de la transformation d'une épave pratiquement détruite, en vaisseau dernier cri.

 

  • Je me demande à qui vous pouvez revendre ces épaves un fois restaurées ? s'étonnait-il.

  • Oh, c'est très simple, émit le capitaine avec courtoisie. Il est des centres de maintenance qui les reprennent en l'état. Ensuite, il y a les collectionneurs et les musées, qui souhaitent une restauration à l'identique. Le vaisseau n'est plus autorisé à voler, mais il a une grande valeur historique. Et puis, la plupart de nos contacts veulent eux un vaisseau parfaitement aux normes. Il possède l'allure d'un vaisseau antique, avec les caractéristiques et le confort d'un navire moderne. Il va de soi que ces vaisseaux subissent un grand nombre de tests avant d'être autorisés à voyager de nouveau. La plupart sont transformés en vaisseaux de marchandises, afin d'approvisionner des colonies reculées, ensuite, il y a les vaisseaux de croisière et scientifiques, qui sont dotés des meilleurs instruments.

  • C'est vraiment merveilleux ! Ce travail est fascinant, assura Amoni, qui comparait souvent l'ingénierie stellaire à du travail d'horlogerie.

  • Ils ont chacun une âme et nos techniciens y déversent tout leur savoir faire, souligna-t-il en fixant avec reconnaissance les experts d'allure très disparate.

 

En effet, il existait des humanoïdes aux teints très variés, des aliens et des lézards herculéens.

 

Le repas se déroula dans la plus parfaite allégresse. Les êtres de lumière passaient près de nous en distribuant des mets et des boissons. Nous étions pénétrés par leur énergie prodigieuse et leur immense joie.

 

Les enfants rejoignirent d'autres clones et jouèrent à se dissimuler dans le vaste hangar encombré de caisses de matériel. L'un des techniciens, un immense lézard de trois mètres de haut, se joignit à leurs jeux, ce qui devint assez mémorable. J'étouffais un rire, alors que le minuscule Nerti serrait la paume énorme de l'immense reptile.

 

Le repas prit fin, nous avons rejoint les enfants, qui se trouvaient en compagnie de deux autres petits aliens très jeunes. Ils étaient occupés à admirer le lézard herculéen en train de soulever avec aisance un réacteur, comme s'il se fut agi d'un poids plume. Un autre comparse, monté sur le vaisseau, s'esclaffa, et boulonna les fixations du réacteur en un éclair.

 

Les enfants éclatèrent de rire, de même que tout notre groupe. Ce lézard était si drôle que ses exploits semblaient très ordinaires pour un être de sa taille.

 

Notre petit intermède prit fin. Il était temps pour nous de regagner le vaisseau. Les enfants saluèrent le grand lézard qui les embrassa avec affection. Ils étaient quelque peu émus de quitter nos nouveaux amis.

 

Nous avons regagné notre petit esquif pour rejoindre le vaisseau. Une fois à bord, le vaisseau de cuivre nous salua une dernière fois, toutes ses lumières clignotantes, en signe d'amitié. Chacun de nous fit des signes de la main, et en quelques secondes, le beau vaisseau de cuivre fusa dans l'infini. Il ne resta qu'un fin sillon de lumière qui disparut bientôt.

 

Le petit Nerti était quelque peu larmoyant. Amoni fixa les enfants avec consternation. Leurs beaux habits blancs étaient devenus gris au niveau des coudes et des épaules.

 

  • C'est la dernière fois que je vous habille en blanc, soupira-t-il. Vous ne tenez pas en place. Regardez-moi toutes ces taches !

  • Ils sont encore jeunes, après tout, exposais-je. Il serait vain de songer à les faire demeurer longtemps à un dîner. Et c'est un vaisseau ferrailleur.

  • Allez dans la salle de bains, et frottez bien vos mains et vos ongles, émit Amoni.

 

Les enfants, un peu penauds s'exécutèrent.

 

  • Il a fallu changer leurs habits deux fois aujourd'hui, soupira Amoni avec désarroi.

  • C'est le cas pour tous les petits aliens. Étant très jeune, j'affectionnais de ramper dans la boue, paraît-il. Je suis sûr que vous aussi, fis-je en riant.

  • Certes non, émit Amoni d'une voix pincée. Je n'ai pas grandi dans les zones marécageuses, contrairement à vous. En revanche, je grimpais beaucoup aux arbres, admit-il. Mes parents m'habillaient en vert...

  • Intéressant, commenta Zilmis. Mes parents étaient très en colère, car je passais mon temps dans le hangar de maintenance, ou à remiser des androïdes. Pourtant, combien d'heures précieuses ais-je pu passer alors !

 

Chacun de nous lui adressa un regard ému, car nous savions combien Zilmis avait souffert des préjugés envers les androgynes. Il avait grandi dans la région des montagnes, où l'oppression des aliens femelles et des êtres intermédiaires était très douloureuse.

 

Ma contrée respectait et admirait les androgynes pour leurs qualités nombreuses. Ils avaient une place à part entière dans la société, et notre langue avait même un vocable adapté qui leur était réservé. Il en était ainsi, contrairement à la vôtre où le genre neutre n'existe pas encore, car « on » concerne des inconnus, « l'» est réservé aux choses et non aux êtres.

 

(Par défaut, « il » est employé dans les messages pour désigner Zilmis, il s'agit en effet d'une traduction inexacte pour un androgyne.)

 

Nous avons cessé là notre conversation. Un peu plus tard, Amoni jugea l'état des ongles des enfants satisfaisant, et ils eurent droit à une histoire avant de s'endormir. Leur mère vint les bercer, en écoutant attentivement elle aussi.

 

Nous nous sommes rendus en nos chambres, heureux, mais fatigués par cette journée. Amoni nous distribua des breuvages apaisants.

 

Très loin au dessus de nous, les bips pressants du départ résonnèrent. Pour une fois, nous serions dans nos lits pour faire face à l'accélération. Les timoniers avaient agi ainsi, afin de préserver le bien être de chacun et aussi, d'écourter notre voyage.

 

Un grondement sourd résonna, puis, un sifflement fort agréable. Inflexibles, les timoniers réglèrent en finesse les vecteurs de poussée de l'immense navire, puis sombrèrent à leur tour dans une inconscience paisible. Les anciens prirent le relais, pour surveiller la trajectoire de l'immense vaisseau.

 

Mon esprit toujours intrigué s'échappa de mon corps, une fois de plus.

 

Nous avions été détectés, c'était un fait. Aussi, Erazel et les autres anciens incurvèrent subtilement la trajectoire du vaisseau. Celui-ci échappa aisément aux dangereuses hordes de pirates que nous avions affrontées à l'aller.

 

Tout près des anciens, se tenaient Orel et Dorian, aussi sereins que d'ordinaire.

 

Satisfait de cette vision apaisante, mon esprit curieux de petit alien voyageur se retira. Je m'apaisais, plongeant en un sommeil des plus agréables. Très bientôt nous serions de retour chez nous. Tout était absolument parfait.

 

Je vous souhaite de même de vivre de si belles immersions, chers amis de la Terre bleue. Soyez loués et remerciés pour votre intérêt si vif.

 

Vous pouvez reproduire ce texte et en donner copie aux conditions suivantes : 

 

 

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