La nouvelle radiance (2/2)
Message d'Orthon (suite)
Nous nous approchons d'une haute bâtisse de métal gris argenté cette fois, et elle me fait un peu penser à une cathédrale, vue de loin. Il existe une sorte de brume lumineuse qui entoure ce site, dont je perçois vaguement les contours.
-
Le bâtiment est très haut, il est entouré d'un champ déflecteur, pour protéger les animaux, explique Orthon.
Sur la pointe de la tour la plus élevée existe un rayon lumineux doré éblouissant, je peux à peine le regarder.
-
Ce type de bâtiment est fait pour capturer l'énergie du soleil directement, ou depuis des réflecteurs. Ici nous sommes au cœur de notre monde, il existe donc des dispositifs de transfert qui permettent d'alimenter tout le site.
Nous franchissons une première barrière subtile, puis une deuxième. Il fait bien plus frais, et je me sens mieux. Le ciel est devenu d'un beau gris ardoise.
-
Cette barrière a été déployée pour ménager le bien être de ceux qui y travaillent expose la femme brune en riant. C'est plutôt indispensable, car ce lieu est aussi leur maison.
En effet un complexe brillant de parapets, de lacs suspendus et de magnifiques jardins, ceinture le site. Une sorte de palais bavarois fastueux, tout de pierre blanche se reflète dans le lac. On dirait un site hôtelier de luxe, au charme raffiné. Alentours, de jolies demeures en forme de dômes arrondis, de palais brillants, proches d'églises baroques, ou de temples romains, mais plus arrondis, forment une fastueuse architecture.
Encore une fois, on voit à quel point les Vénusiens ont un sens esthétique prononcé. L’herbe de ce lieu est très étrange, car elle brille d'un coloris émeraude des plus parfaits, et des milliers de fleurs sauvages y courent librement.
-
Cette herbe n'a pas besoin d'être tondue, explique la guide avec un large sourire. Cette variété atteint une hauteur maximale, fleurit, puis se ressème. Nous avons laissé pousser les fleurs, car cela nous semble bien plus coloré ainsi. Voici le réacteur principal, dit-elle en montrant un édifice argenté sillonné d'énergie. Il fonctionne à l'énergie solaire, et n'émet pas de pollution, ni de déchets. On ne peut s'approcher, la radiance est trop forte, explique-t-elle en montrant des sillons argentés qui courent en spirale jusqu'en haut de l'édifice.
Je contemple l'édifice avec quelque tristesse, mais je l'écoute aussitôt, car il est vrai que la radiance est très élevée, et un peu déstabilisante. Une énergie blanc bleuté et lumineuse descend en spirale sur les côtés de la tour et s'enfonce dans le sol en flux réguliers. C'est une technologie extraordinaire, car les rayons lumineux ne semblent abrités dans aucun dispositif. Ma curiosité a toujours été bien grande pour ce type d'installation.
Je suis les trois guides à l'intérieur d'un haut édifice, qui ressemble cette fois à du métal rouillé. Je découvre qu'il n'en est rien au dedans.
-
La tour de conversion abrite une énergie radiante et consciente, expose Orthon pour satisfaire ma curiosité. L'énergie se déplace suivant sa volonté propre, donc elle n'a pas besoin de tuyaux ou de câbles pour se mouvoir.
-
Nous sommes ici dans le bâtiment des pères de nos pères et des mères de nos mères. Il a été laissé en l'état. Ainsi, tu le vois bien rouillé, tel qu'il est vraiment, dit-elle avec un rire. Le bâtiment a juste été entouré d'un champ protecteur, sinon, il tomberait en pièces.
Je suis très heureuse d'entrer dans un atelier aux parois gris clair argentées, où un grand nombre de jeunes hommes et femmes s'affairent. Ils contemplent notre quatuor avec intérêt. Il semble que de leur côté, je sois une sorte de vapeur à demi perceptible, mais ils ont l'air à peine surpris.
Les ouvriers façonnent des pièces de métal et les polissent, mais de manière si étrange que cela est merveilleux à voir. Le métal se plie et s'enroule suivant les geste précis de leurs mains. Ils sont très concentrés, mais on voit une joie immense habiter leurs traits. Cela a l'air d'une tâche extrêmement gratifiante.
Une fois qu'ils ont fini de façonner les pièces, ils s'approchent d'un véhicule agricole qui a été couché sur le côté. Là, ils « collent » les pièces métalliques par l'esprit avec une aisance parfaite. L'un des ouvriers étend la main et une soudure si parfaite se forme, que l'on a l'impression que les pièces ont été taillées dans le même bloc de métal. Une huile végétale est appliquée sur les zones sensibles et les rouages (pour ne pas polluer les sols) et les niveaux de l'engin sont refaits. Il existe des niveaux en huile, en eau, en méthane, et en une autre matière énergie, inconnue de notre monde.
-
Cette machine peut fonctionner indéfiniment, en principe une vie entière sans s'arrêter. Les pannes proviennent du sable. Malgré la considérable quantité de déflecteurs qui l'équipent, il arrive que quelques grains de sable passent et bloquent le mécanisme.
Je m'approche un peu, et aperçois des dispositifs en forme de pelle, mais mous comme des coussins, destinés à amener les légumes en hauteur. Ensuite, ils sont brossés et précipités dans une sorte de brumisateur, pour ôter le gros de la terre, explique-t-elle. C'est impressionnant de complexité. La sustentation magnétique semble produite par un énorme aimant circulaire à la base de la machine. Je suis étonnée que cet engin ne comporte pas de place en bas pour le conducteur. Les Vénusiens rient.
-
Il y a longtemps que ces engins sont pilotés à distance, s'amuse la guide. Ils ne comportent aucun danger pour les êtres vivants. Nos ingénieurs ont conçu une barrière pour empêcher les oiseaux et les insectes d'être aspirés involontairement. Si un être vivant est avalé par l'appareil, celui-ci s'arrête, et l'animal peut ressortir. Si un fruit est visité par un insecte ou un autre type d'animal, il ne sera pas récolté. Les animaux sont informés à l'avance du passage de nos engins, et savent quels fruits sont laissés à leur disposition. Nous entretenons la relation la plus harmonieuse possible avec les milieux naturels.
Encore une fois, mes larmes sont sur le point de jaillir. Je ressens un tel amour, une telle harmonie émaner de tous ces êtres, que je suis habitée d'une immense gratitude.
Je les remercie pour toutes ces informations si agréables, et ensuite, nous passons dans une autre salle.
Celle-ci est très différente. Il s'agit d'un hangar, où des machines luisantes de la taille d'une toupie à béton sont garées en ordre. Je suis frappée par l'odeur légère, qui ressemble un peu à un champ de marguerites ou de fleurs sauvages. Les guides expliquent que cela est dû à l'huile végétale.
Ces machines ont juste besoin d'être nettoyées et graissées. Tous les dispositifs électroniques sensibles à l'eau sont retirés. Puis, des robots les dirigent sur des tapis roulants. Des jets de vapeur très puissants sont passés à l'intérieur des rouages, pour ôter les grains de sable. Une eau noire est recueillie dans de grands bacs, chargée de limaille et de particules terreuses.
-
Cela peut vous sembler beaucoup, expose la jeune femme aux cheveux bruns. Mais la plupart de ces engins sont en service depuis plusieurs de vos siècles. Cette eau est retraitée au niveau moléculaire, pour recueillir toute la terre et le sable d'un côté, tout le métal de l'autre. L'huile, la peinture et le vernis sont également recueillis pour servir à peindre et graisser de nouveaux engins. Nous réutilisons absolument tout. Ensuite, bien sûr, l'eau ressort par ce circuit, elle est absolument pure et vous pouvez la boire.
Je vois une eau pure et laiteuse, enrichie en minéraux. Chacun de nous la boit en effet, et moi aussi, malgré ma forme d'esprit. Elle est vraiment excellente. Ce lieu est donne une impression de chaleur très vive, en raison sûrement de la hausse vibratoire. L'eau a un goût légèrement fruité rafraîchissant. Je me sens de nouveau fort bien en ce lieu, et habitée d'une très grande joie.
Nous sommes bondissants comme des enfants, tout excités à l'idée de découvrir la dernière salle. Il s'agit de la salle finale, où les machines sont accueillies par leurs propriétaires.
Ce jour là, une cérémonie a lieu, et trois véhicules agricoles flambants neufs ressortent, escortés par une vingtaine d'androïdes. Une musique très joyeuse retentit. Plusieurs familles de Vénusiens sont là, parents, grands-parents, arrières grands parents et enfants. Une petite table a été dressée, et tous les ouvriers sont attendus.
Les agriculteurs, très émus, inspectent leurs véhicules et montent dans la cabine, située à environ 6 mètres du sol.
Ils sont fous de joie de retrouver leurs anciens engins, parfaitement restaurés et brillants comme un miroir.
Chacun s'installe et se sert ensuite pour une petite fête. Tout le monde est empli d'une joie communicative.
-
Ainsi, il y a bien une cabine ? On dirait que cela sert uniquement pour déplacer les véhicules jusqu'aux champs, dis-je aux trois guides amusés.
-
Oui, il en est bien ainsi. L'engin est autotracté à distance, mais il peut être piloté par un humain. Ces cultivateurs sont très émus d'avoir pu retrouver les machines qu'ils ont toujours connues. Ils ont tissé avec elles un lien très particulier, expose la jeune femme.
-
Cela est bien vrai, assure un Vénusien aux cheveux noirs et aux yeux bleus. Je n'ai toujours connu qu'une machine et nous en sommes très dépendants. Certes l'engin que l'on nous a prêté est excellent, mais nous aimons à retrouver celui auquel nous sommes habitués. Il existe une vie dans chaque chose, et nous en sommes très conscients. Les experts ont agi avec beaucoup de respect pour les remettre en état et les moderniser. Cela me fait penser aux Terriens qui s'attachent à leur voiture et n'ont pas envie d'en changer.
Je suis très émue et étonnée.
-
Ainsi, vous connaissez nos voitures ?
-
Bien sûr, répond l'agriculteur. Je me nomme Mildrel, et je suis ravi de converser avec vous. Nous avons le plus grand attachement pour votre monde. Vous traversez les mêmes défis que nous autrefois. L'humanité de la Terre a effectué une grande prise de conscience. Vous êtes sur la bonne voie, il ne faut pas relâcher vos efforts.
D'autres Vénusiens se lèvent et approuvent, je suis entourée de visages emplis de bienveillance.
J'entends de toutes parts des messages de soutien débordants d'émotion :
-
Vous êtes les meilleurs ! Continuez comme cela ! Nous vous aimons !
C'est une brillante manifestation d'amour envoyée à tous les habitants de la Terre !!! Ils font une grande ovation. Et mes larmes coulent, car ce moment est très fort.
La jeune guide brune se lève et invite chacun à aller se rasseoir, car elle voit que je suis très émue.
Je m'éponge les yeux une nouvelle fois et je parviens à m'exprimer de nouveau.
-
Je ne m'attendais pas à cela. Nous sommes si humbles par rapport à vous. Nos pensées sont matérielles, et parfois peu glorieuses, concernant la colère, la lassitude. Notre niveau spirituel...
-
… va vers le meilleur, il va vers le meilleur, nécessairement. Votre monde est obscur et gris, pour l'instant. Il est parfaitement normal d'éprouver de la lassitude et de la révolte par instants. Votre monde peut renaître parfaitement, de la même manière que nos amis ont transformé des véhicules ternis en engins brillants !
Orthon nous interrompt alors.
-
Il existe une chance pour entrer dans le concentrateur. Une possibilité unique de le visiter. Le voulez-vous ? me demande-t-il. Nous ne pourrons rester qu'un court instant.
J'accepte aussitôt en leur disant que c'est là un très grand cadeau. Je me lève et salue tous les Vénusiens présents en les remerciant de tout mon cœur.
Il y a de nombreux messages joyeux qui fusent de toutes parts et chacun fait des signes de la main.
Orthon se dirige vers une autre salle. Celle-ci est toute bleue, bleu azur, et une porte d'énergie s'ouvre lentement dans la paroi, entourée d'un fin ruban de lumière qui s’élargit en tremblotant.
Je suis très intimidée, mais je le suis dans le passage. Il y a d'abord un couloir tout noir, puis il s'élargit et nous débouchons en une salle de commandes.
Celle-ci est d'une beauté exceptionnelle, les murs sont bleu océan, tout sillonnés de lumières blanches et dorées. Des fils d'énergie pure courent un peu partout sur les parois. Trois Vénusiens dirigent le centre opératoire, et sont très concentrés. On voir leurs cheveux blonds voler lentement au fil des influx d'énergie qu'ils redirigent.
Je lève les yeux, et il n'y a pas de plafond, seules des lignes d'énergie dorées descendent le long des parois. La radiance est très forte et cela tire un peu sur le lien.
Orthon m'invite à m'écarter du centre. Je m'approche d'écrans de surveillance. Ils montrent le soleil et les différents jets de matière en forme d'arche qui jaillissent à sa surface, mais avec une netteté telle que nos meilleurs instruments en rêveraient.
Cela fait comme une sorte de ballet, de danse, explique Orthon en mon esprit. Le soleil est conscient, il réagit aux pensées, aux influx de l'univers mère, puis du grand soleil galactique, qui répercute à son tour ces ondes, ces commandes. Il s'agit de modifier toute la création dans son entièreté. Il n'y a pas d'essai, ou de manœuvre, tout ce qui se joue ici est essentiel. D'autres pupitres servent à ajuster le flux d'énergie dans la centrale, on peut en faire entrer plus ou moins.
Ensuite, nous quittons cette pièce et nous dirigeons vers les étages inférieurs, moins radiants. Je reprends pied. Nous entrons en ce qui ressemble à l'entrée d'une cabine d'ascenseur, les murs sont gris ardoise cette fois. Là se teint un petit alien un peu timide, d'environ 1m20. Je le salue. Il me salue de même cordialement et je m'adresse à Orthon.
- Cet endroit était vraiment très intense.
-
Oui, ce lieu est un site de commande, le flux est très fort à cet endroit, seuls les plus élevés spirituellement des nôtres peuvent y séjourner longtemps, dit-il en secouant ses cheveux blancs.
-
Je m’aperçois que les autres guides n'ont pas pu nous suivre.
-
En effet, dit il. Cela aurait été trop incommodant pour eux. Le dispositif de protection a été ajusté pour vous. Cette autre salle permet de réguler la production d'énergie de cette région de Vénus, dit-il en montrant un grand nombre de pupitres avec des Vénusiens attentifs, en tout une cinquantaine.
-
Cela fait penser à une tour de contrôle.
-
C'en est une, nous envoyons l'énergie à très grande distance. Il faut contrôler qu'elle arrive bien et que tout circule normalement. Nous l'envoyons aussi vers certains vaisseaux, certains centres de soin, et aussi, des dispositifs plus grands, comme des sites protégés. Nous pouvons protéger beaucoup de choses, des volcans, des astéroïdes fragiles, des bases stellaires, des cultures et des personnes. Nous pouvons aussi régénérer le corps physique. L'énergie est envoyée à ceux qui en font la demande, de manière gratuite et instantanée. Nous surveillons aussi tout ce qui vient de l'espace. L'homme de la Terre et ses explorations engendre nombre de débris qu'il faut régulièrement retirer. Il existe de nombreux petits vaisseaux qui recueillent tout ce qui risque d'entraver les routes spatiales. Les fragments les plus petits sont les plus dangereux. La plupart des vaisseaux lumière des peuples stellaires y sont insensibles, mais beaucoup emploient encore des vaisseaux métalliques et un impact à très grande vitesse avec un petit objet peut engendrer des dégâts énormes.
Je suis intriguée par un autre panneau qui montre la Lune. On y voit une carte avec des noms de villes et des petits points rouges, sur la face visible et sur la face cachée. J'ai très envie de m'en approcher pour mieux voir, mais je sens que ce ne serait pas respectueux.
-
Ces points sont des bases, me dit-il, il en existe plusieurs de Vénus, plusieurs de nos amis de la Terre et d'ailleurs.
Je me retourne lentement et je vois toujours le petit être filiforme. Le petit alien est très agréable et poli, et je le salue de nouveau. Il souhaite parler.
-
Je m'occupe de la maintenance de certaines bases sur la Lune, explique-t-il. Je suis l'ami des Vénusiens. Il ne faut pas seulement entretenir les couloirs, fournir des aliments et de l'eau, il faut aussi envoyer de l'énergie.
-
Je suis abasourdie que de l'énergie puisse être envoyée aussi loin !
-
L'énergie est produite sur place, explique le petit alien, mais parfois, il en manque un peu. Ce moyen permet d'en disposer à des moments cruciaux, comme par exemple en cas de défaillance sur un vaisseau-mère.
-
Vous êtes exceptionnels, ne puis-je m’empêcher de les complimenter. Votre monde est magnifique. Merci de m'avoir permis de passer d'aussi bons moments !
Je sens que la visite tire à sa fin. Il existe un troisième panneau et cette carte représente la Terre, si belle, mais si menacée par l'exploitation insensée des énergies fissiles et fossiles.
-
Tu oublies le meilleur ! Nous agissons aussi pour stabiliser votre Terre, vous permettre d'être en meilleure santé, vous permettre de vivre aussi normalement que possible la période qui vous reste à vivre sur les dimensions matérielles de votre époque. Soyez confiants en nous, en notre pouvoir. Vous pouvez nous demander de l'aide si vous avez besoin. Je vous envoie tout mon amour et tout mon soutien.
Je les salue de même et ils prennent mes mains dans les leurs. Je ressens une énergie puissante et un amour inouï. C'est à peine traductible avec des mots. Un grand faisceau blanc envahit ma pensée.
-
Nous serons toujours là, nous veillons vos pas, murmure Orthon.
Puis, le couloir se replie lentement, et le message s'interrompt. Je suis bouleversée par cette nouvelle incursion, si imprévue et bénéfique sur Vénus.
Vous pouvez reproduire ce texte et en donner copie aux conditions suivantes :
-
qu'il ne soit pas coupé
-
qu'il n'y ait aucune modification de contenu
-
que vous fassiez référence à notre blog : http://www.unepetitelumierepourchacun.com