Les passages vers le monde intérieur (3/4)
Message du Guérisseur Lestrys (suite)
Le matin arriva, et une joie intense nous habita. Nous étions un peu attristés de quitter Sirtalin, mais très confiants face à la nouvelle tournure que prenaient les événements. Il faudrait juste un peu de temps pour que la belle cité puisse refleurir et s'ouvrir aux visiteurs.
Nous avons suivi notre guide, toujours cachés sous le dispositif d'invisibilité. Cette fois, nous devions descendre et Sirtalin éclaira pour nous un escalier malcommode bas de plafond, qui aurait pu aboutir à un cellier. En réalité, il était très profond, et sinistre à souhait. Stency agrippa mon bras avec force, au moment où il aperçut une énorme chenille gluante d'un aspect peu reluisant, occupée à dévorer toute la moisissure qui poussait sur les parois.
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Ce n'est rien mon cher petit. Cet animal n'est pas très engageant, mais c'est une espèce très utile en ce lieu.
Nous sommes parvenus au bas de l'interminable volée de marches, et Sirtalin nous mena vers une petite grotte.
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Je ne peux aller plus loin, fit-elle avec regrets. Bonne chance à tous, dit-elle en serrant Henri près d'elle.
Il l'étreignit de même en essuyant quelques larmes.
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Je n'oublierais pas tout ce que vous avez fait pour moi, exposa-t-il.
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Allez-y voyageurs, ne traînez pas, nous intima-t-elle. Je vais tenter de les attirer ailleurs.
Nous nous sommes aussitôt mis en marche, pas très rassurés en ce lieu. Notre hôtesse avait eu la bonté de nous fournir des provisions, aussi, notre avancée s'en trouva un peu ralentie, au début, tout du moins.
La galerie éclairée de lampes à plasma ternies avait un aspect brut, mais bien dégagé, hormis de petits groupes de lézards occupés à monter la garde et à jouer à des jeux de hasard en se querellant.
Nous sommes parvenus jusqu'à une galerie toute de pierre grise et basse de plafond, où je me cognais à plusieurs reprises. Un cri à glacer le sang retentit, et nous avons cessé notre progression.
On se battait un peu plus loin. Et quel combat ! Des bruits de raclées, de coups et de cris de douleur fusèrent.
Nous sommes restés dissimulés dans un renfoncement, puis, un bruit de casserole nous parvint. Des lézards couverts de bleus avançaient en boitillant, leurs armures en désordre, l'air hébété. Ils passèrent devant nous sans nous voir, chose très heureuse.
Après quelques minutes, nous avons repris notre avancée. C'était une épreuve pour moi, car je devais me plier en deux, de peur que mon chargement ne racle le plafond. J'avais en plus le poids de l'enfant accroché dans une écharpe spéciale.
Bientôt, un plafond plus éclairé et plus haut se révéla. Malgré ma fatigue, je m'engageais résolument sur le dallage gris et propre. Une odeur caractéristique nous saisit d'effroi : celle du sang. Je posais mon chargement et me précipitais dans ce qui avait été autrefois une salle de repas.
Il restait peu de chose du mobilier en miettes et l'endroit était désert. Hélas, un lézard gisait sur le côté, le crâne fracassé. Je m'approchais du mourant avec l'espoir de le sauver, mais m'interrompis dans mon élan. Le lézard tendait sa main presque inerte vers un boîtier tombé non loin de lui, afin de donner l'alarme.
Son bras inerte retomba, et il ne put jamais accomplir son sinistre dessein. Oktos se pencha auprès du reptile inerte et ferma ses yeux. Henri récita une prière.
J'étendis un foulard sur la plaie affreuse du lézard pour la dissimuler, repris mon chargement et invitais les enfants à enjamber le corps.
Stency fondit en larmes et en fut incapable. Alors, je m'empressais de le porter afin de sortir de cet horrible endroit. Nous avons abouti à une autre salle, et là, toute l'étendue de la scène m'apparut enfin.
La salle contenait des incubateurs, dont les portes avaient été ouvertes. Cette zone donnait sur les cuisines, en arrière plan, où il régnait une vive activité.
Nous avons juste eu le temps de nous cacher. Un lézard herculéen apparut et emporta les différentes victimes du combat. Ensuite, un son caractéristique se fit entendre dans les cuisines...
Mon cœur se serra, et je baissais les yeux. A cet instant, dans le sable, j'aperçus de minuscules empreintes très légères. Celles, très particulières, de petits clones nouveaux nés incapables de marcher longtemps.
Un immense espoir m'envahit alors. Quelqu'un avait libéré les petits êtres à temps pour leur épargner visiblement une fin culinaire et s'était opposé aux gardes. J'inspectais les empreintes avec soin et dus interrompre mes recherches, car un cri retentit.
Deux lézards de haute taille venaient d'entrer dans la cuisine. Il poussèrent des cris avides.
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Fermez toutes les issues ! Il y a un humain qui est entré ici ! lança le plus féroce.
Je projetais un long éclair cuisant en direction du belligérant le plus proche, et il s'effondra au sol. Le deuxième lézard, voyant l'éclair me chargea de sa lance. Sans réfléchir, je le projetais contre un tonneau, alors, il s'écroula.
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Très impressionnant ! commenta Oktos.
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Nous ne sommes pas censés être remarqués, répondis-je.
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Vraiment désolé, assura Henri.
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Vous n'y êtes pour rien. Aidez-moi, il doit y avoir un passage ! exposais-je.
Henri et moi-même avons si bien cherché, que nous avons trouvé une porte dérobée dans le mur. Il restait à l'ouvrir. Je posais mon sac et tendis le petit clone à Henri, puis pris une profonde inspiration et franchis la paroi.
Parvenu derrière, j'avisais une haute porte de pierre entourée de tringles métalliques, que je parvins à déverrouiller, le temps que mes compagnons le franchissent. Puis, je la condamnais de nouveau.
Des empreintes délicates s'éloignaient dans le sable, puis elles disparurent. Je devinais que les petits clones avaient promptement été emportés par leurs protecteurs hors de ce lieu. À nouveau, une profonde joie habita mon cœur.
Un boyau intégralement obscur au plafond plus clair s'ouvrait devant nous. Fixant le sol, Oktos inspecta les empreintes à son tour.
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Il existe une vingtaine de lézards, et sans doute autant d'enfants. Ils avaient des vaisseaux qui attendaient ici, ils avaient tout prévu, dit-il en montrant des renflements de sable et les marques de patins caractéristiques de deux esquifs.
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C'est une très bonne nouvelle, assurais-je.
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