L'avènement de la lumière (4/4)
Message du Professeur Zolmirel (suite)
Erazel nous conta ses activités de la journée. Elle avait, quant à elle, participé à différentes missions de sauvetage, l'une de ses activités quotidiennes. Sur ma planète, le sauvetage est quelque chose de très simple, pour les anciens dévoués à cette tâche.
Cependant chacun de nous s'extasia.
- Il n'est rien que de fort ordinaire, nous précisa Erazel en toute modestie. J'ai trouvé un petit alien téméraire qui escaladait un arbre, et l'ai ramené à sa famille à temps. Ensuite, j'ai pu extirper le sabot d'un jeune faon maladroit, qui était pris dans le rocher, dans la région des glaces. Il m'a fallu ensuite agir pour dégager une demeure écrasée par la chute d'un arbre énorme. Nous étions en tous cinq experts sur place. Une partie des experts à soulevé l'arbre, tandis que les autres ont stabilisé provisoirement la maison, puis, l'ont déplacée. Il a fallu replanter l'arbre un peu plus haut, là où le terrain était plus solide. Les habitants étaient extrêmement choqués, mais aucun n'a été sérieusement blessé. Évidemment, il y avait pas mal de dégâts sur ce logis, vous vous en doutez bien. Il a tout de même fallu quelques heures, pour réparer tout ceci de manière parfaite et invisible, avant de quitter ses charmants occupants. Peu avant l'heure du déjeuner, j'ai dû me rendre dans l'espace, à bord d'une frégate, peuplée de hors mondes fort méfiants. Ces derniers tentaient de lutter en vain contre un incendie, qui avait pris des proportions épouvantables. Je ne suis point experte en flammes, et donc, l'ancien chargé de cette opération a dû être tiré de son lit hâtivement. C'est lui qui s'est chargé d'étouffer les flammes. Ensuite, l'un d'entre nous s'est occupé de calmer les occupants du vaisseau, tandis que chacun de nous restaurait la cohérence moléculaire des parois, des poutrelles, des vitrages et surtout, obturait parfaitement chacune des canalisations. En voyant tout ceci, l'équipage s'est confondu en remerciements. Ils se sont longuement excusés de leur attitude insensée. Et bien sûr, nous avons été conviés à leur table. Cela dit, je suis un peu fatiguée de tout ceci. Cela peut paraître facile pour vous de nous voir œuvrer. Mais en réalité, l'énergie qu'il faut déployer pour recréer tout ce qui a été détruit par le feu, par des impacts, ou par l'eau, est assez considérable. Un repos m'a été accordé, que je goûte en votre compagnie.
Chacun de nous n'avait soufflé mot durant cet extraordinaire récit. Erazel était d'ordinaire très discrète sur ses activités de la journée, avec toute la modestie qui sied aux anciens. J'étais comblé de bonheur de songer, qu'ils puissent ainsi voguer d'un lieu à l'autre pour secourir des familles et des équipages en péril. Le fait de secourir des hors monde était également une activité dévolue aux anciens.
- Comment pouvez-vous donc savoir qu'un équipage de hors mondes, situé sans doute à plusieurs années-lumière est en péril ? demandais-je.
- C'est très simple, répondit Erazel. Un équipage en péril émet des pensées de désarroi et de peur. Les pensées voyagent instantanément. Celles-ci sont immédiatement captées par les équipes d'experts en poste autour de notre planète, qui surveillent tout l'univers connu. L'écoute de l'espace est permanente. De cette manière, ils peuvent envoyer sur le champ un ou plusieurs anciens pour leur venir en aide. Ils nous indiquent précisément le lieu de l'espace où se tient le péril, et ce qu'il convient de faire. Ils savent aussitôt si nous serons en mesure de secourir ces personnes ou non. Nous avons tous nos propres compétences. Lorsque le péril est proche d'un monde ami, nos experts contactent les leurs, si jamais ils ne sont pas en mesure de recevoir le message. Alors, l'équipe de sauvetage est envoyée depuis ce monde, et le résultat est identique. Il faut vraiment aller très vite, il n'y a que la pensée qui permette de pouvoir envoyer un expert sur un vaisseau en péril. Nous n'avons que quelques minutes, lorsqu'il y a dépressurisation, ou incendie.
- Cela m'a toujours semblé très extraordinaire de songer que vous puissiez aller dans l'espace sans vaisseau, émit Zilmis d'une petite voix.
- Nous le faisons sans y penser, assura notre si sage ancienne. On nous ménage un couloir d'approche sécurisé en général. Cela nous permet d'abriter une victime qui a été éjectée. Cela est fort naturel, comme il est naturel pour vous de traverser une porte, quand de temps à autre vous n'y prenez pas garde.
C'était l'exacte vérité. Par rapport à l'âge immense d'Erazel, Zilmis et moi-même étions bien jeunes. Nos talents pour traverser la matière s'affinait de jour en jour. Je pouvais accomplir bien plus de choses par le truchement de la gravité, de même que Zilmis utilisait son immense talent spirituel pour réparer les vaisseaux les plus irrécupérables.
- Comment donc n'êtes-vous pas atteints par le vide de l'espace ? s'étonna le sage Amoni.
- Il n'a pas le temps de nous atteindre, répondit simplement Erazel. Lorsque le couloir se constitue, il forme comme un tourbillon qui creuse l'espace, d'un point a vers un point b. Nous ne faisons que traverser l'espace un court laps de temps. Ce laps de temps est si court, que nous ne pouvons en aucun cas être affectés par la dé gravitation, l'absence d'atmosphère, et le froid du vide stellaire. Si vous le préférez, nous rentrons simplement au milieu du navire endommagé. En cas de besoin, nous pouvons déployer autour de nous une barrière protectrice contre la chaleur ou le vide. Le vide n'est pas dangereux pour notre espèce dans l'immédiat. Les nôtres résistent durant quelques minutes, cela est assez pour les secourir.
- N'est-il pas audacieux d'oser de la sorte vous matérialiser dans le cockpit d'un vaisseau inconnu en péril ? questionnais-je.
- Si, répondit Erazel. Cela est une sorte d'ingérence, n'est-il pas ? Mais nous n'allons pas rester assis les bras croisés alors que des navigateurs ont grand besoin d'aide. Lorsque les messages de désarroi des navigateurs sont suffisamment humbles et bienveillants, nous pouvons intervenir. Nous pouvons leur porter secours, car ils l'ont demandé. Pour essayer d'aplanir les choses, les experts en charge de communication avec les hors monde envoient un message préliminaire aux vaisseaux en péril. Nous entrons à leur bord une ou deux secondes plus tard, mais cela permet au moins d'officialiser les choses.
- Est-il donc arrivé que l'équipage soit très hostile ? questionna Orel.
- Oui, répondit Erazel. Cela arrive parfois. Mais je n'ai pas été témoin de ce genre de mission. Les missions d'entraide qui nous sont dévolues, concernent essentiellement des équipages d'explorateurs. Lorsque le bâtiment en péril est un navire militaire, ou impérialiste, ce sont d'autres experts qui agissent. La phase d'approche est plus délicate. Le but n'est pas forcément de sauver le navire à tout prix, ni ses occupants, hélas. Nous devons agir sans nous mettre en danger. Il faut donc que les occupants du vaisseau manifestent le désir de nous voir monter à leur bord. Je vous laisse imaginer ce que cela peut donner lorsque nous avons affaire à des escouades de reptiles plutôt portés sur la barbarie. Les experts en communication envoient alors des équipes constituées d'êtres semi éthérés. Nous avons pensé qu'il en était mieux ainsi. Cela donne en général de très bons résultats. Les êtres inconsistants ne sont pas affectés par les armements, ils peuvent agir sur des navires endommagés directement par l'esprit. Il est très difficile pour des êtres qui vivent dans des lieux de domination militaire, d'âpreté, d'imaginer qu'ils puissent être secourus de manière désintéressée. Mais il est formidable de pouvoir faire germer cette pensée nouvelle en leur esprit. Nous nous y employons, en tout cas les experts s'y emploient. Ce sont les vrais maîtres en télécommunications qui peuvent agir pour ouvrir les cœurs endurcis des conquérants de l'espace. Ensuite, lorsque la mission réussit, c'est l'occasion d'envoyer une équipe de diplomates pour converser avec les émissaires de ces mondes nouveaux. Nous sommes toujours curieux de pouvoir communiquer.
Chacun de nous ne soufflait mot, totalement ébloui par ce récit épique d'un autre lieu, d'autres mondes lointains encore à découvrir.
Amoni avait été lui-même appelé plusieurs fois par des experts. Les anciens l'avaient emmené séance tenante dans l'espace à plusieurs reprises, afin de stabiliser des blessés au cours du mois dernier. Il ne s'était jamais complètement remis de ces incursions déroutantes, à chaque fois à bord d'un vaisseau différent où il avait reçu le meilleur accueil. J'avais fini par m'habituer à ces étranges voyages impromptus d'Amoni, lorsqu'il devait sortir de table précipitamment, ou qu'il devait interrompre l'arrosage de ses plantations.
Chacun de nous se réjouit grandement ce soir là, qu'il puisse en être ainsi. Nous avons murmuré des prières et des bénédictions, en louant la bonté des anciens, pour agir avec tant de prévenance sur tout ce qui pouvait menacer notre monde. Nous étions radieux de songer que leur action s'étendait également vers nos planètes amies, où plusieurs peuples aliens et humanoïdes très affables avaient noué avec notre monde des relations cordiales.
C'étaient les anciens qui veillaient nos pas, qui guidaient nos vies, et c'étaient eux également, qui prévenaient les différents accidents, qu'il s'agisse d'enfants imprudents, d'animaux blessés, ou de lieux de péril, loin dans l'espace. Nous étions toujours très impressionnés de leur talent pour venir en aide à autrui sans se poser de questions.
Je vous salue chers amis de la Terre bleue, avec à cœur les mêmes pensées d'admiration pour ceux qui œuvrent de la sorte sur votre Terre, en aidant autrui, tous ceux qui ont besoin d'assistance, à toute heure du jour et de la nuit. En aimant et en étant là tout simplement. Recevez toutes mes pensées de gratitude, mon cœur vous accompagne.
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