Au delà de Mars (1/2)

Publié le par Aurélia LEDOUX

Au delà de Mars (1/2)

Message du Guérisseur Lestrys

 

Chers amis de la Terre bleue, chers êtres de lumière en devenir, je reviens pour vous relater la suite de notre périple.

 

Nous nous trouvions avec mes amis en une agréable cité intérieure de Mars. A ce niveau dimensionnel du supra, nul désagrément ne pouvait nous atteindre. Ulphéniel, notre guide Vénusien, nous avait convié en une jolie demeure, le temps que les enfants se remettent de nos aventures, ainsi que nous mêmes.

 

Il s'agissait d'un voyage absolument magnifique, et nous étions très heureux d'explorer le lieu de vie tropicale qui environnait notre maison. Très semblable au milieu que l'on peut trouver en la Terre intérieure, il en différait cependant, par le coloris du ciel, un peu plus doré en certaines heures, et par les variétés de plantes, qui comportaient de superbes espèces de palmiers, de plantes tropicales à larges feuilles dans les vallées, de cactus et de fleurs sur les sommets. Un paysage approchant serait une pente montagneuse humide couverte de fleurs de la Jamaïque.

 

Nos travaux avaient bien avancé, concernant l'étude du sol, de l’hydrographie et de la végétation. Célia et moi-même étions très intrigués par l'eau qui s'écoule en ce lieu, qui possède des vertus de guérison à peine croyables.

 

Notre guide Ulphéniel nous adressa un message psychique agréable. Il nous informait que notre séjour arrivait à son terme et nous invitait à apprêter nos bagages. Ceci fut fait en peu de temps, les enfants un peu attristés de quitter ce lieu. Nous nous réjouissions cependant de revoir bientôt la Terre.

 

Mais Laïev notre ami Terrien ne partageait pas notre joie. Il était assez attristé du départ de Paul, notre autre compagnon, qui avait rencontré une jeune femme. Avec subtilité, nous comprenions qu'il aspirait au même bonheur. Eratsu, qui est sans doute le plus habile d'entre nous à parler, lui exposa sans détours son ressenti.

 

  • Je vois quelque affliction poindre en vous à l'idée de quitter cet endroit. Et si d'aventure il vous plaisait de ne point nous suivre, sachez que nos cœurs ne sauraient s'en offenser. Je vois en votre esprit que vous aspirez vous également à quelque noble compagnie féminine, et ce lieu ne manque pas d'aimables Terriennes qui sauront ravir votre regard. Pourquoi ne pas séjourner en quelque lieu d'escale pour quêter celle qui manque à votre vie ? Vous nous rejoindrez ainsi le moment venu quand vous le souhaiterez.

 

Laïev fut abasourdi par cette tirade. Il faut dire qu'Eratsu était toujours très prévenant et habile à lire la peine des autres, même avant qu'eux-mêmes ne parviennent à la formuler.

 

  • Vous m'avez offert tellement, exposa Laïev. Je serai très peiné de vous quitter. Mais il est vrai que j'aimerai également rencontrer une femme. A dire vrai, je l'espère depuis longtemps.

  • Je vous le souhaite très fort, répondis-je aussitôt. Il est vrai que ces rivages intérieurs abritent un plus grand nombre d'humains.

  • Les méandres de l'âge et de la science ont fait de nous des chercheurs éblouis chaque jour par la nouveauté de nos découvertes. Mais pour un homme de la Terre, la recherche n'est point une fin aussi heureuse, sauf si elle aboutit à une quête du cœur, celle d'une heureuse épouse qui saura vous combler de bonheur. Je vous souhaite tout le meilleur à vivre, cher ami scintillant ! lança allègrement le sage Darsimen.

 

Laïev réalisa que juste derrière lui, le soleil qui montait dans le ciel luisait d'or et éclairait son visage et sa barbe claire d'une plaisante manière. En cet instant faste, un vaisseau piloté par notre ami Ulphéniel vint se poser devant notre jolie demeure. Nous sommes montés avec un dernier regard pour notre petit havre de paix, puis, le vaisseau a plongé vers la jungle surmontée de brumes. Ulphéniel pilotait de main de maître et son second, un petit jeune homme discret était concentré sur des cartes qui défilaient à toute allure.

 

Nous sommes demeurés silencieux, tout absorbés par la beauté du paysage. Je sentais se faire jour en mon esprit la présence d'amis, qui nous espéraient et nous attendaient. Le beau vaisseau argenté s'engouffra dans un tunnel illuminé de voyants multicolores et en peu de temps, déboucha en une sorte de passage dimensionnel menant vers une galerie dont les parois ocre brillaient faiblement. Il accéléra légèrement, et émergea de l'obscurité, débouchant sur le clair matin radieux de la belle Mars. C'était prodigieux, nous étions passés de l'autre côté du miroir !

 

Le beau vaisseau s'éleva, quittant l'atmosphère de ce monde sable et gagna un petit corps rocheux criblé d'impacts. Il s'agissait bien sûr de Phobos, le petit satellite de Mars d'environ 20 kilomètres de diamètre.

 

Stency et Lokhaïl, très impressionnés, fixaient par la baie vitrée le décor à couper le souffle qui approchait. De vastes rocs abrupts, surmontés de montagnes de suie parées de traînées de glace luisantes nous plongèrent dans l'admiration. Austère et très escarpée, la petite lune de Mars révéla au fond d'un cratère très abrupt, une petite cité stellaire soigneusement dissimulée.

 

Notre vaisseau se posa, franchissant une série de sas hermétiques qui se refermèrent juste derrière, et nous sommes descendus. Notre guide nous mena tout naturellement vers des appartements confortables. Ensuite, il se dirigea vers Laïev.

 

  • Nous avons pour vous de meilleures fins. Suivez-moi donc, il existe des quartiers où vivent de nombreux humanoïdes, avec également des Terriens. Vous serez heureux de les connaître.

 

Chacun de nous se figea, et salua Laïev en prononçant un mot, une parole de bénédiction. Je le quittais à mon tour et murmurais une prière.

 

  • Que les vents stellaires vous portent très loin, mon ami. Soyez heureux et en pleine santé, que vos desseins s'accomplissent et vous permettent de trouver l'âme noble qui attend la joie de vous reconnaître.

  • Je n'oublierai jamais ce que vous m'avez permis de vivre. Quelles fabuleuses aventures ! lança Laïev en séchant ses larmes. Je suis sûr que nous nous reverrons.

 

Stency et le petit Lokhaïl se mirent à sangloter. Ils s'étaient tous beaucoup attachés à chacun des membres de notre petit groupe. J'étais moi aussi peiné que trois de nos compagnons aient déjà choisi de nous quitter. Mais cette peine était modérée par le fait que je ressentais une grande joie à l'idée qu'ils puissent trouver le bonheur.

 

Nous sommes restés dans nos appartements pour nous reposer, et je m'employais à consoler Stency.

 

  • Pourquoi tous nos compagnons Terriens s'en sont-ils allés ? sanglotait-il. Où est Nimlin ?

  • Il est dans la nature des Terriens, plus que dans la nôtre de chercher une moitié. Ils n'ont point seulement été faits pour œuvrer en laboratoire. La recherche scientifique ne peut suffire à satisfaire toutes leurs attentes en cette vie, du moins pour la plupart d'entre eux. Tu ne dois pas être triste, Paul et Laïev vont vivre de très heureux moments. Paul a rencontré une épouse. Et le petit Nimlin va avoir une nouvelle mère, c'est très important pour lui. Quelque chose me dit que nous le reverrons bientôt, tu dois donc te réjouir très fort pour lui, mon chéri.

     

Stency, un peu rassuré, s'en fut jouer au jardin avec Lokhaïl. Évidemment, il peut sembler très paradoxal qu'il puisse exister un jardin sur un astéroïde, mais cette base comportait tout le confort. Et l'élément végétal, extrêmement présent, rendait ce lieu de vie tout à fait exceptionnel.

 

 

Un peu après l'heure du repas, un message psychique nous parvint à tous, une invitation. Celle-ci était des plus courtoises et nous nous sommes donc apprêtés avec le plus grand soin. Je choisis pour ma part une ample tunique rouge brodée de motifs aériens. Célia resplendissait dans un habit très léger paré de fleurs chatoyantes, bleues et roses. Mon petit Stency avait revêtu pour l'occasion une combinaison spatiale bleu vif en tissu brillant, et l'adorable petit Lokhaïl portait lui un habit similaire blanc pur. Darsimen et Eratsu avaient choisi des toges brodées bordeaux et pourpres, alors qu'Issaltir et Mellkit étaient habillés de tons vert printemps et vert forêt. Bien sûr, notre petit groupe ainsi paré pouvait sembler assez disparate, mais en affichant ainsi ses couleurs, chacun soulignait un trait de sa personnalité, de sa vocation de chercheur. Pour nous, les couleurs ont une grande importance. Ainsi, le rouge, ma couleur favorite, était celle traditionnellement allouée aux généticiens et aux guérisseurs.

 

Ulphéniel se faufilait juste par le couloir menant à nos appartement, alors que nous étions occupés à en sortir, chacun apportant avec lui des mets que nous avions confectionnés. Nous avons ri de cet à propos.

 

Notre groupe se dirigea vers un bel élévateur de cristal, révélant la nuit veloutée de la mystérieuse Phobos endormie. J'avais appris à apprécier la beauté particulière des astéroïdes, des mondes en dormance qui attendaient leur heure. Nous nous trouvions sur l'une des parties les plus obscures de l'astre, à peine éclairée de la belle Mars qui disparaissait à l'horizon. Cela dit, pour un enfant, ce spectacle avait de quoi faire froid dans le dos, et Stency agrippa très fort ma main. Célia serra son autre main et lui sourit d'un air rassurant. Elle rayonnait de tant d'amour que les enfants parvinrent à recouvrer un peu de courage.

 

L'élévateur s'ouvrit sur un superbe couloir tout doré, richement éclairé. Alors, aussitôt, toutes nos peurs s'effacèrent. Une vaste baie vitrée révélait en contrebas l'étonnant spectacle du vaisseau en partance prochaine pour Arétha, qui avait été entièrement rénové, et dont les parois brillaient intensément.

 

Face à nous, se tenaient deux arcades menant vers des salles brillamment éclairées, où un groupe assez ému nous attendait. Je reconnus aussitôt nos amis. En tête venait l'impérieuse Semna, vêtue d'écarlate, qui affichait à présent un bon sourire, ainsi que Sizris, la grande Istigrit, le petit Andezza, et le frêle Schin, qu'il soutenait de son bras. Nous avons aussitôt étreint tous nos compagnons, en versant des larmes de joie. Chacun de nous s'extasia concernant la santé du petit Andezza, dont le teint était redevenu d'un beau blanc nacré.

 

Le jeune clone était encore un peu affaibli, mais tout était pour le mieux. Il allait profiter du voyage du retour pour se reposer plus amplement. Avec bonté, Ulphéniel lui servit un remède et chacun de nous s'attabla.

 

  • Quelles-ont donc été vos découvertes, amis, à l'intérieur de ce monde ? s'enquit Sizris, d'un air vivement intrigué. Y a-t-il des sources, comme l'indiquent nos légendes ?

  • Il y a bien plus que des sources, répondit Eratsu. Tout ce que nous avons vu dépasse de loin l'entendement, pour ce qui est du perfectionnement atteint par la beauté végétale.

  • Je suis tellement heureux, répondit le petit alien. Cela veut dire que cette planète est toujours vivante malgré les apparences. Cela est une très grande chose, si elle fleurit ainsi de l'intérieur.

  • Que vous est-il donc arrivé après notre départ ? demandais-je, en dévisageant avec bonheur un grand nombre de petits êtres attablés juste derrière nous.

  • Notre vaisseau a été déplacé, et les traces entièrement effacées, car l'armée humaine approchait. Heureusement, les militaires se déplacent bien lentement par rapport aux vaisseaux-lumière, exposa Istigrit. Notre seul souci, évidemment, était de réparer les avaries et d'explorer Mars, mais les soldats ne l'entendent nullement ainsi. Il est regrettable que les colons Terriens soient si peu portés sur l'entraide spatiale. Ils devraient savoir qu'un vaisseau échoué en territoire occupé doit obligatoirement être secouru, surtout en milieu hostile.

  • Les dirigeants des Terriens sont hélas avides de gisements, de technologies, exposa Célia. Une partie d'entre eux a bon cœur, une partie seulement. Ils auraient arraisonné votre vaisseau et vous auraient certainement mis dans des camps pour être interrogés. Ces camps n'offrent que peu de confort, et je songe avec peine qu'ils n'auraient pu vous apporter nul soin médical malgré le désir de certains de le faire. L'organisation militaire des Terriens est très stricte, tout comme l'obéissance aveugle aux ordres. Un seul homme dirige à lui seul des milliers d'individus, il n'existe nulle créativité de la pensée en une telle organisation. Une partie des nôtres a pu entrer en contact efficacement avec certains Terriens par la voie de l'esprit. Il est heureux que plus d'habitants souhaitent s'ouvrir à la prescience, la télépathie. La télépathie est le moyen de se départir des armes, de tout connaître de l'autre et de voir en lui un ami. Il est dommage de considérer un peuple uniquement par rapport à ses dirigeants. Après tout, les lézards des sables que nous avons croisé, pour certains, m'ont fait une excellente impression, très différente des pillards que vous avez pu rencontrer.

  • Nous en sommes en effet conscients, reprit Semna. Vous avez appréhendé là des mystères que nous n'avons fait qu'entrevoir, voyageurs. Après tout, nous ne sommes que des aliens de science et sans vous, nous n'aurions pu sortir de cet écueil. Je vous remercie d'avoir protégé ma famille.

 

Chacun de nous sourit, en disant qu'il avait été heureux de le faire.

 

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Publié dans Messages

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