Le voyage dans l'esprit de l'homme
Message d'Ektazzo
C'est moi de nouveau, Ektazzo, votre ami alien.
Je le vois mieux, il est très mince, assez petit et vêtu d'un habit blanc éclatant. Ses prunelles noires sont immenses, très brillantes avec une lueur de peine et de chagrin.
Il voudrait faire mieux, pouvoir se racheter. Il est encore un peu hésitant, un peu méfiant. Des êtres de lumière l'entourent, il marche dans un grand vaisseau lumière, il m'en fait visiter les salles.
Le peuple de la Lumière nous a recueillis, mes jeunes et moi, les deux serviteurs qui m'accompagnaient sont encore en convalescence. Il leur est permis de travailler seulement quelques heures par jour.
L'un d'entre eux a failli mourir, ces petits ont montré bien plus de bravoure que moi, admet-il.
Il prend place sur un siège et salue trois aliens de peuples différents, des Terriens et d'autres humanoïdes s'approchent, chacun sait qu'il va conter une histoire. Il en est surpris et un peu étonné.
Mes amis, voici ce message par lequel je vais poursuivre mon récit. C'est celui bien sûr de l'incursion dans l'esprit humain.
Mais cela commence par une planète, vide, désolée, stérile.
Il s'apaise, je ressens une grande paix jaillir de lui.
Une sphère brune, poussiéreuse et rocheuse apparaît avec de hauts sommets effilés. On voit une légère brume à l'horizon, mais pas de vie, pas de plantes, ni d'eau. Ce monde est endormi. Pourtant, c'est un spectacle magnifique.
Voici notre planète, reprend Ektazzo.
C'est un monde sépulcral comme vous pouvez le constater. Même si cette vision est d'une grande beauté, il se trouve que nous ne sommes pas parvenus à le guérir.
D'autres que nous s'y emploient avec de légers signes encourageants.
C'est un long, un très long travail.
Nous avons essaimé dans l'espace pour cette raison, nous délestant peu à peu de nos émotions, de nos schémas de fonctionnement psychique, notamment de la gestion habituelle des émotions qui est vôtre d'une vie à l'autre.
Évidemment, ce cercle sans fin de renaissances ne nous a pas mené bien loin. Nous étions certes détachés de toutes les pulsions dites « animales ». Se nourrir, dormir, boire, se reproduire et avoir une vie affective, émotionnelle. Oui, nous n'étions plus soumis à tout ceci. Dès lors, les navigateurs pouvaient hiberner pendant très longtemps, sans aucun sentiment de peine, de vide, de manque à leur réveil. Ils poursuivaient allègrement la quête scientifique.
Jusqu'à ce que nos anciens, nos plus grands experts, réalisent que nous étions devenus alors, incapables d'avoir des descendants par voie naturelle.
Nous avons été obligés de cloner nos enfants, génération après génération, les privant de ce lien d'amour d'avec leur mère, leur père, leur famille.
Cela nous a permis d'expérimenter en de nombreux domaines fascinants. Il nous était possible de faire émerger une créature à partir de quatre à cinq lignages d'ADN principaux, par exemple. En mêlant des chaînes d'ADN riches, propres à une série d'individus sélectionnés avec soin, nous obtenions des générations de créatures parfaitement soumises, efficaces et très serviables. Nous avons porté au sommet la création de petits techniciens habiles très travailleurs par exemple. Les êtres que nous avons engendré excellaient à l'entretien des arches stellaires, des bases spatiales immenses. Ils étaient d'une très grande intelligence, d'une rapidité exemplaire et nous servaient bien.
Puis, des milliers de milliers de vos années sont passées et nous avons dérivé vers une planète, votre planète. Je tire ces souvenirs de nos très grands ancêtres, car nous sommes tous reliés, en vérité, et ce temps est toujours vivace en nos souvenirs par le flot d'images qui y a été préservé.
La Terre comprenait ce que les génies nommaient « une masse génétique inimaginable ».
Il nous fallut des générations pour étudier les plantes, les minéraux, les fossiles, les animaux et bien sûr, les hommes. Cette étude nous fascinait.
Nous étions très désireux de combler le vide génétique de notre espèce avec les vôtres et toutes les autres formes de vie que la Terre portait. Ceci pour pouvoir enfanter de nouveau. Mais il n'est point permis à des formes de vie telles que nous de se multiplier de la sorte, car nous avons suivi le chemin de l'involution, de l'avidité, de la négation des autres peuples stellaires. En prenant aux autres mondes, nous ne donnions rien en échange, et toute civilisation qui porte en elle ce fruit obscur de la convoitise est vouée à sa perte.
Les croisements avec votre espèce eurent lieu.
Cela accéléra notre évolution de manière exponentielle. Il s'agissait en réalité d'un piège à retardement pour les pompeux chercheurs de vie.
En couplant notre ADN à celui des autochtones, en pratiquant d'effroyables expériences, un lien karmique s'est tissé entre nos deux mondes. Nous étions jusqu'alors dénués de toute émotivité, de toute notion du bien et du mal, me direz-vous.
Mais nos plus jeunes générations de clones n'étaient point ainsi. Nos clones sont aussi vos enfants. Il y eut des défections, des révoltes nombreuses, silencieuses, mais déterminantes. Ils ne voulaient plus poursuivre les expérimentations. Je me suis moi-même opposé farouchement à ce que l'on enlève de jeunes enfants de la Terre.
Mais les ordres étaient stricts. Au cours de ces enlèvements, évidemment, nous, êtres de nuit, êtres de vie, étions follement attirés par le psychisme de ces enfants humains endormis. Certes, nous pouvions les paralyser, les enlever, mais une fois que notre esprit se mêlait au leur, nous étions incapables de garder le contrôle.
Nous étions happés en des tourbillons de rêve, en des pans de vie entiers qui nous propulsaient dans une extase vibratoire intense.Cela était un grand mystère.
Il s'est produit une scission parmi les chercheurs, beaucoup d'entre eux désirant explorer ce fourmillement de vos esprits. Nous avons essayé d'en savoir plus, sur l'intangible, l'impalpable, et là, les résultats nous ont franchement effrayés.
Rien n'arrivait par hasard, nous étions certains d'avoir pu modéliser toute la trame du vivant en schémas, en algorithmes parfaits, mais tout notre édifice s'écroulait.
Il existait une cinquième loi de causalité suprême que nous n'avions point encore envisagée, celle de l'action de la Grande Intelligence gouvernant tous les mondes, qui surpassait tout. Elle pouvait tout remodeler à sa guise, par le « hasard ». Ce hasard, complètement immanent, pouvait tout changer, absolument tout, par de minuscules revirements de situation, qui faisaient vaciller tout ce qui avait été planifié de longue date par nos génies. Vous pouvez parler de divinité. D'ailleurs ce mot est juste, il existait une force gigantesque qui agissait sur la Terre, sur les hommes sur toute la vie, pour remettre les choses à leur juste place.
Nous étions affolés d'avoir meurtri un peuple si proche de cette intelligence que nous craignons et que nous révérons, sans jamais mentionner son nom. Oui, cela nous faisait très peur, nous savions que des conséquences fâcheuses en découleraient.
Les génies présidant les expériences ont décidé d'un commun accord, d'entrer en contact avec cette intelligence, de tenter de communiquer avec elle à travers les sujets endormis.
Nous étions follement excités, en même temps terrifiés, bien sûr, mais nous avions appréhendé l'un des secrets de la Connaissance.
C’était la Source elle-même qui avait agi pour que nous lions notre ADN à celui des Terriens, pour que notre cœur, notre émotivité, rejaillisse et que nos âmes reviennent se poser sur nous.
Hélas, dit-il en s’interrompant, cela implique une transformation.
Il montre sa main portant un bandage, on voit que sa peau scintille et semble se désagréger. Une autre peau, argentée et brillante est visible en dessous.
Cette transformation est dangereuse, délicate, elle a déjà emporté plus d'un d'entre nous, mais nous sommes déterminés à présent à suivre le chemin que nous aurions du prendre, celui de la Lumière. Ce chemin nous appelle, il est agréable.
Ektazzo achève son récit. Chacun l'entoure et le remercie, il y a des murmures ravis. Le professeur Zolmirel s'avance et lui remet un pot minuscule avec une variété de plante nouvelle. Il est absolument comblé. Son petit serviteur, rescapé s'approche et ensemble, ils se lèvent et marchent le long du grand couloir bordé de panaches stellaires. On voit l'éclairage bleu vif superbe du vaisseau-mère et par la vaste baie vitrée, des milliers d'autres croiseurs fastueux.
La scène s'éloigne.
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