Le voyage vers le monde intérieur

Publié le par Aurélia LEDOUX

Le voyage vers le monde intérieur

Message du Guérisseur Lestrys

 

Le voyage 4 (suite)

 

 

Me voici devant vous chers amis, je suis le guérisseur Lestrys.

 

Je viens parachever ce récit de notre descente dans le monde intérieur.

 

J’en étais resté à ce point de mon histoire, où nous nous trouvions avec mon compagnon Eratsu, devant une mare bien profonde d’eau très chaude.

 

Nous venions de voir un minuscule alien fort jeune se débattre en vain dans cette eau des profondeurs.

 

Nous nous sommes précipités pour lui venir en aide sans réfléchir. Le pauvre petit était épouvanté.

 

Nous avons réussi à le faire sortir de l’eau, mais il était si affaibli qu’il a perdu connaissance. Son esprit très jeune avait vu trop de choses bouleversantes et n’a pas résisté. Nous l’avons vêtu d’un chandail trop grand pour lui et avons continué notre marche dans ces caves entrecoupées d’une eau bouillonnante et baignées d’une magnifique clarté rosée.

 

L’air était comme vivant, saturé d’énergie, l’air vibrait, un peu comme s’il eut été parcouru d’insectes, mais cette vibration était agréable, elle nous apaisait.

 

Nous étions environnés de dizaines de galeries rosées qui se croisaient à angle droit, et ce, à perte de vue. Nous pouvions voir très loin devant nous, nous étions en un ensemble gigantesque de galeries creusées visiblement par les Grands Êtres, des géants immenses ayant vécu bien avant notre ère et la vôtre. Sous nos pieds, se dessinaient parfois des niveaux de galeries supplémentaires, s’enfonçant à une profondeur sans nom. Cela effraya bien mon petit Stency lorsqu’il les vit, et nous avons du le rassurer longuement. Il nous fut donné également de ressentir un vertige intense à la vue de ce spectacle des profondeurs. Malgré notre âge bien avancé, nous n’étions point très fiers, même si nous tentions de montrer de l’entrain face à notre petit compagnon tout tremblant.

 

Ces cavernes, je dois dire, se prolongèrent longuement, il nous fallut près de quatre jours pour les traverser.

 

Nous étions guidés en ce lieu par une présence invisible, que nous sentions de plus en plus nettement.

Le soir venu, nous nous sommes arrêtés pour dormir, en nous blottissant dans un sable blanc très moelleux aux grains fins. Le petit clone minuscule était entré en stase.

  • Donnes lui à boire, dit soudain le petit Stency. Il y a quelque chose qui guérit dans l’eau.

Eratsu et moi nous sommes regardés. Nous étions toujours ravis de la vivacité d’esprit de notre si jeune compagnon. Le petit clone malingre était une créature faisant partie d’un autre peuple que le nôtre. Il possédait de grands yeux noirs très vifs, avec une peau blafarde sillonnée de plis et révélant son réseau sanguin et plasmatique. En vérité, pardonnez-moi, il n’était pas un très joli petit au premier regard.

Les nôtres sommes plutôt attachés à présenter un teint uni plus ou moins nacré, sans marques disgracieuses. Nous avons compris que cet enfant était une créature de laboratoire, créée sans soin par des généticiens dépourvus d’émotions.

Stency nettoya le petit visage étrange couvert de boue avec un linge doux. Le crâne du petit alien était énorme comparé à son cou minuscule et ses membres grêles.

-     C’est un « suivant   » ! croassa Eratsu d’un ton épouvanté

-     En effet, tout porte à le croire, dis-je avec le plus grand calme

-     Nous … nous avons secouru un suivant … bégaya t’il en tournant sur lui-même et en récitant précipitamment des prières

 

Il vous faut savoir qu’un suivant est un clone élaboré en laboratoire à l’identique, qui partage une conscience collective avec ses frères et sœurs. Certains peuples aliens pratiquent le clonage à grande échelle de ce type d’individu, ce qui pour les miens est une chose absolument impensable. Pour les miens, il est formellement défendu d’élaborer deux fois la même créature. Cela est impensable, inimaginable, pour nos généticiens et serait considéré comme une effroyable hérésie. En effet cela veut dire que l’âme, la conscience de ces individus est disséminée en des millions et des millions de fragments. Je m’employais à apaiser mon compagnon, le petit alien était très affaibli et je sentais qu’il était de notre devoir de l’aider.

 

  • Du calme mon ami, c’est un enfant. Les suivants ne présentent pas de danger particulier. Nous avons tiré ce petit être de l’eau, Nous n’allons tout de même pas l’y replonger !
  • S’il a failli se noyer, c’est bien que sa présence ici constitue une transgression absolue, philosopha Eratsu
  • Oui, peut-être. Mais qui sommes-nous pour juger ? Nous n’allons pas l’abandonner simplement parce qu’il ressemble à des millions et des millions de créatures qui lui sont semblables. Ce serait très inapproprié. Et il n’en est pas responsable.
  • Il risque de mourir. Il a sûrement été rejeté par l’intelligence collective qui le maintient en vie ! Son âme l’a sûrement déserté ! bégaya Eratsu, en proie à une crainte superstitieuse
  • Oui, c’est possible, mais nous n’en savons rien. Nous sommes au niveau où œuvrent les grands génies des cavernes, et il y a une chance pour qu’ils parviennent à soigner ce petit. Il a eu le courage de nous suivre, de choisir un nouveau chemin.
  • Les aliens de Kolménide sont très incommodés par la haute radiance, expliqua Eratsu
  • Oui, peut-être, mais il existe forcément des exceptions. Sinon, pourquoi ce jeune nous aurait-il suivis ? Ce lieu est très clair pour ses yeux sensibles.

Ces arguments avaient apaisé mon ami. Je soulevais le jeune être inerte et versais un peu d’eau mystérieuse dans sa bouche. Il sembla en avaler une minuscule gorgée. Stency me fit un large sourire rayonnant de joie. Notre peuple n’aimait pas beaucoup fréquenter les aliens de Kolménide, ceux que vous appelez « petits gris », nos deux espèces ne se mélangent pas trop, même si ce sont des cousins éloignés.

 

Nous considérons leur monde comme un endroit mécanique, dénué de créativité, dénué d’âme. Les généticiens qui œuvrent parmi les miens ne sont pas tous des bienfaiteurs, mais ils respectent au moins ce principe de l’âme, de la vie. Même si certains en ont très peur, ils clonent les petits serviteurs de manière honorable.

 

L’allure du jeune alien endormi était un peu étrange pour les nôtres. Ses yeux paraissaient immenses pour son visage, et sa peau ne possédait pas le même rayonnement énergétique que chez les miens, mais je sentais une pensée agréable s’échapper de sa personne endormie.

 

Au matin venu, le blessé poussa un glapissement. Ce fut Stency qui se précipita vers lui pour lui donner à boire.

Le jeune alien cligna des yeux craintivement, nous lui faisions très peur. Mon petit Stency tenta de le réconforter. Il essaya de lui faire dire son nom. Le petit alien paraissait ne pas comprendre la question.

Je perçus une pensée brillante d’intelligence.

  • Qu’est ce qu’un nom ?  
  • C’est ce qui fait que tu es toi, répondis-je au petit alien
  • Je ne sais pas… je ne sais plus. Nous devions embarquer sur un vaisseau stellaire…avec mes frères. Je suis perdu, émit sa pensée craintive
  • Détends-toi petit, tu es entre de bonnes mains, nous allons veiller sur toi. Nul ne te fera de mal ici. Regardes comme cet endroit est beau ! lui dis-je

Le petit alien cligna des yeux et observa le beau rayonnement doré qui illuminait la caverne. Cette lumière était très vive pour ses prunelles si sensibles d’être de la nuit.

Comme comprenant son malaise, la lueur déclina est diminua d’intensité.

Le petit alien gratta ses mains. Je constatais que la peau en était très étrange. Elle était comme fendue, et en dessous on pouvait voir une lueur argentée très vive. Le jeune être avait l’air de fondre de l’intérieur. Ces lésions ne semblaient pas douloureuses, mais gênantes.

Je le serrai près de moi pour le réconforter.

  • Nous marchons dans les profondeurs de
    la Terre, vers un lieu de guérison. Tu y seras le bienvenu, lui dis-je par la pensée
  • Toi ami de nous maintenant, reprit le petit Stency, qui avait senti nos pensées converser. Je très heureux ! souligna t-il avec une joie exubérante

Le frêle alien reprit encore un peu d’eau mystérieuse. Il put se dresser sur ses jambes avec peine. Il était très affaibli, mais au moins ses peurs avaient reflué. Je compris qu’il s’agissait d’une sorte de conversion. Cet être éloigné de la vie allait devoir être intégralement transmuté, une opération lente et périlleuse. Il pouvait très bien ne pas survivre.

 

Eratsu avait vu sa main en train de fondre lui aussi. Saisi de compassion, il ne formula plus la moindre objection. Il était de notre devoir d’aider cet enfant si jeune à redevenir celui qu’il aurait du être. Ce lieu allait l’aider à reconquérir sa vraie nature.

 

Il me peinait qu’un enfant puisse souffrir par la faute de généticiens imbus de leur science aveugle. Je portais le petit gris affaibli.

 

Stency s’efforçait de le faire parler, sans succès. Le pauvre clone, malgré des efforts admirables, ne pouvait prononcer que des couinements étranglés. Il s’exerçait de jour en jour.

Au bout de deux jours, il put marcher d’un pas hésitant, ses jambes furent habitées des mêmes lésions claires inquiétantes. Il ne s’en préoccupait plus cependant.

 

Nous étions en train de boire de l’eau tiède qui suintait de la paroi et de nous restaurer en soirée. Le minuscule alien émit un petit cri et nous regarda avec une intense satisfaction. Puis, il prononça un mot.

  • Looo…khhaa…ïl
  • Lokhaïl ?  demanda Stency surexcité
  • Kso, couina le petit alien très fier de son exploit

Nous étions ravis, nous avons félicité notre petit compagnon. Le fait qu’il ait réussi à choisir un nom était un signe indubitable de sa guérison. Il s’était définitivement séparé de l’âme obscure qui l’avait fait naître et croître. Il souhaitait désormais habiter un nouvel habit de lumière.

 

Notre progression nous mena bientôt en un lieu plus étroit où il faisait bien chaud. Une caverne claire aux parois pourpres et blanches descendait en serpentant. Des lits de grès se dissolvaient pour former un étagement de sable en contrebas de la paroi, sur la droite. La paroi de gauche, plus brune et plus dure montrait des signes d’érosion. Un fleuve avait coulé là des milliers et des milliers d’années durant, polissant la roche en un ensemble de belles marches naturelles brillantes, et parcourues par endroits de minces filets d’eau.

 

Le petit Lokhaïl était plus vaillant, mais faillit glisser sur les marches. Il me fallut donc le porter, tandis qu’Eratsu portait le petit Stency.

 

 

Le voyage vers le monde intérieur

Nous avons cheminé longuement dans ces galeries descendantes et avons abouti à un passage bien plus grand, d’une roche beige dorée, toute illuminée d’un éclat relativement doux au regard.

 

Là, devant nous, se tenait un groupe de cinq créatures. La première était un homme de grande taille, et un autre, plus malingre, puis venaient deux aliens âgés courroucés, qui piaillaient en se disputant. Un autre alien, plus posé, les regardait avec inquiétude. Les belligérants se turent en avisant notre quatuor.

  • Qu’est ce qui vous amène en ce lieu, voyageurs ? gronda l’un des aliens les plus âgés avec mécontentement
  • Nous cherchons tout comme vous les rivages de Lumière. Je suis Lestrys, voici mon compagnon Eratsu, le petit Lokhaïl et Stency, dis-je en présentant mes amis
  • Très heureux, répondit l’alien posé, je me nomme Issaltir, voici le premier Panresu et Mellkit, son grand conseiller, nos deux compagnons Terriens sont Giorgio et Laiev
  • Nous voguons depuis des semaines en cette marée ! fulmina Panresu. Rien que des galeries sans rien au bout !

Il portait une chasuble pourpre parée de marbrures noires brillantes et ornée de bijoux.

Son grand conseiller, Mellkit, était un valet très élégant, qui semblait peiné de constater combien ses souliers et son collant de soie brodé, étaient couverts de boue et de sable.

  • Nous sommes heureux, avoua le valet d’un ton enjoué. Votre compagnie nous réjouit bien. Je suis navré de me présenter devant vous si lamentablement vêtu, exposa t-il d’un ton embarrassé, car son habit violet brodé était déchiré en plusieurs endroits.
  • Nous avons été jetés en ce lieu par une eau tumultueuse, qui s’est retirée tout soudain, ronchonna Panresu, en cherchant son couvre-chef parmi les rochers.

Il ne le trouva point, ce qui n’améliora guère son humeur. Ce fut Lokhaïl qui extirpa une tiare ornée de pierreries de la vase.

  • Merci petit, grommela Panresu en essorant son bien
  • Cela fait-il longtemps que vous voyagez avec ces jeunes ? s’enquit Mellkit d’un air surpris
  • Un clone malingre et un petit imparfait qui ne fait point partie des nôtres ! siffla Panresu
  • Pourquoi êtes-vous si désobligeant ? Tout le monde a le droit d’espérer voir les rivages de lumière, protestais-je avec vigueur.
  • Ces immatures risquent de nous ralentir ! bougonna l’ancien avec obstination. Je vous préviens ! S’ils tombent dans un gouffre, ce n’est pas moi qui irais les rechercher !

 

Les deux Terriens étaient restés juste là fort silencieux. L’un des hommes assez rebondi, Giorgio, baissa les yeux tristement. Sa jambe comportait une plaie assez grave, qui avait été pansée hâtivement. Je compris que ce voyageur avait fait une chute semblable. Le front et le bras de l’homme comportaient aussi des meurtrissures.

 

Panresu et Mellkit reprirent leur conversation houleuse, tous deux ne tombant point d’accord sur la direction à emprunter. Finalement, après une longue attente, Eratsu me désigna le couloir de gauche, je l’y suivis, le petit Stency gambadant à nos côtés. Le minuscule Lokhaïl marcha avec peine, Stency l’aidant de son mieux.

Les deux Terriens Giorgio et Laiev nous emboîtèrent le pas, de même que le valet Issaltir, qui était un alien tout à fait jovial. Mellkit nous rattrapa promptement.

  • Pouvons-nous voyager en votre compagnie ? nous demanda Issaltir. Ils n’arrêtent pas de se quereller sur la direction à suivre.
  • Bien sûr ! répondit Eratsu. Soyez les bienvenus.

 

Chacun nous remercia.

Cette situation nous étonna bien, car nous pensions ce groupe très soudé. Un Panresu très en colère, nous rattrapa au pas de course, fort peu enclin à voyager seul. Le soir vint et la température de la caverne chuta brutalement. Nous avions beaucoup marché et même Panresu et Mellkit, qui conversaient avec quelque vigueur, se turent. D’autres galeries plus petites, jaune pâle, mais toutes aussi labyrinthiques, apparurent.

 

Il y avait des passages par en dessous, par au dessus, qui montaient et qui se chevauchaient.

Des lueurs éclairaient certaines galeries et d’autres demeuraient dans l’ombre. Nous sommes descendus par un passage légèrement pentu. Nos pieds enjambèrent des restes de carcasses en mauvais état. Quelque chose vivait là et y avait fait du dégât, de toute évidence.

 

Chacun ne fit plus le moindre bruit. En effet, nous venions de repérer des traces de reptiles carnivores dans le sol meuble. Eratsu, plus sensible que nous tous réunis, émit un cri bref que chacun comprit.

Nous nous sommes dissimulés dans une caverne qui longeait la galerie et avons attendu sans faire de bruit. Panresu, qui possédait une canne solide en métal sculpté, la tendit à Eratsu. Un lézard bipède apparut soudain, tentant de flairer notre piste. Notre espèce produit fort peu de phéromones, mais cela était sans compter le blessé, dont la plaie était récente. 

 

Il faisait environ trois mètres de haut, et son allure laissait présager qu’il n’avait pas fait un bon déjeuner depuis un certain temps. Une canne, aussi solide soit-elle, était une arme dérisoire face à pareil monstre.

Issaltir, qui fouinait dans son sac depuis pas mal de temps, en extirpa un paralyseur assez petit. Il tendit l’objet à Eratsu, en lui recommandant de viser le ventre de l’animal.

 

Mon courageux ami sortit de notre cachette, il se plaça face au saurien et tira à bonne distance, espérant de tout cœur que le faisceau serait assez puissant pour endormir un si gros lézard.

Il y eut un éclair aveuglant et un grondement, suivi d’un bruit sourd. Effondré au sol, le lézard dormait à présent. Il s’agissait d’un jeune allosaure. En apercevant ses longs crocs acérés, je fus saisi d’effroi et félicitais mon ami. Faisant passer les plus jeunes devant nous, nous nous sommes enfuis prestement, avec l’espoir que l’animal ne se réveillerait pas trop tôt.

Une galerie claire et jaune pâle, de section rectangulaire, nous faisait face.       

 

Nous avons couru, très vite, aussi vite que nous pouvions, et sommes parvenus en une autre galerie, plus sombre, mais comportant à intervalles réguliers de l’eau mystérieuse.

 

Là, nous nous sommes reposés, puis nous sommes repartis aussitôt. Nos sens d’aliens nous avertissaient d’un danger qui continuait de nous guetter, se rapprochant ou s’éloignant de temps à autre. En fonction, nous accélérions ou nous ralentissions l’allure. Cela nous épuisa, car il fallait porter les enfants à bout de forces, en plus de nos bagages.

 

Eratsu perçut d’autres présences en ces lieux, il s’avéra bientôt que des pensées familières se faisaient jour.

Nous avions détecté d’autres aliens de notre peuple ! Notre excitation grandit, à mesure que les signaux psychiques devenaient plus nets. Il s’agissait de très jeunes enfants avec quelques adultes. Notre détection de leur présence était si fine, que nous pouvions sentir leurs pas, un peu en deçà de notre position.

Puis, une paroi rocheuse a laissé apparaître un tunnel secondaire et nous avons enfin pu les rejoindre !

 

Ce groupe comprenait sept aliens fort agréables. Il y avait une dame alien de haute taille, trois petits clones, un clone adulte, et un premier un peu absent. Ce premier était frappé de l’absence due à son très grand âge. Nous appelons ce type d’alien, premier « défaillant », mais cela réchauffait le cœur de voir à quel point sa famille l’appréciait.

La grande alien, qui était un valet de noble allure, expliqua que leur groupe avait du affronter une horde de sauriens affamés, et que l’un des animaux avait été paralysé grâce au fluide de leur ancien. Le lézard avait aussitôt été dévoré par les autres prédateurs. Ils avaient pu fuir, et l’eau mystérieuse avait quelque peu ranimé l’esprit vacillant de l’ancêtre.    

 

Ces nouveaux compagnons nous enchantaient. Mais devant un tel afflux de petits clones, Panresu protesta sèchement.

  • Encore des petits avortons ! bougonna t-il, car il n’aimait point les clones

Néanmoins, nul ne fit attention à lui, notre progression reprit son ardeur, le danger se rapprochant ou s’éloignant de temps à autre. Au bout d’une journée, les lézards renoncèrent à nous pourchasser et cela fut heureux, car Giorgio, qui était blessé à la jambe, peinait à avancer de plus en plus.

 

Nous avons examiné sa plaie et l’avons baignée d’eau mystérieuse. J’essayais de l’irradier de mon fluide d’alien. Cela apaisa quelque peu l’élancement de notre ami.

 

Le matin venu, il put recommencer à marcher malgré sa plaie cuisante. Il nous fut donné de découvrir un véhicule minier antique qui ranima tous nos espoirs.

Il ne s’agissait que d’une petite plate-forme, mais celle-ci venait à point nommé.

 

Panresu ordonna qu’on le laisse inspecter le véhicule. Nous le laissâmes donc comme il en formulait le souhait, hélas, il y épuisa sa science et la plate-forme refusa catégoriquement de démarrer.

 

Il se remit donc en route, s’attendant à ce que l’on le suive, mais le valet Mellkit protesta vigoureusement, lorsque le premier autoritaire nous ordonna de venir à sa suite.

  • Partez si le cœur vous en dit, mais permettez au moins que d’autres que vous essayent de remédier à la panne de cet engin !
  • Je suis un premier et donc votre chef ! Je ne souffrirai aucun manque de respect ! fulmina le grincheux petit personnage
  • Il n’est nul manque de respect dans le fait de remettre cette plateforme en route, fit posément Issaltir. Par ailleurs, nos maîtres nous ont abandonnés, nous laissant choir en ce lieu étrange. Ils vous ont abandonné vous aussi ! Je réprouve l’ordre des castes ! Ces petits ont montré plus d’une fois leur vaillance. Ils ont droit à la même considération que nos compagnons humains et que les aliens femelles. Je refuse d’abandonner notre ami de la Terre ! Ce véhicule est notre seule chance.

 

Panresu verdit sous cette tirade, mais ne trouva nulle phrase cohérente à formuler, tant sa colère était grande. Il perdit de sa superbe et alla bouder sur un rocher voisin.

 

Nous avons examiné le véhicule, mais je n’étais pas un très bon mécanicien, les autres non plus. Seuls les plus jeunes semblaient comprendre de quoi il en retournait. Nous les avons laissé agir, leur faisant entièrement confiance.

 

Un long silence suivit, ponctué seulement par les tintements produits par les enfants affairés à recâbler la petite plate-forme. Ces derniers avaient découvert une trousse à outils sommaire dont ils faisaient bon usage. Mon petit Stency et l’adorable Lokhaïl que nous avions recueilli, étaient de très habiles mécaniciens, ainsi que les trois autres petits clones.

 

Après plusieurs heures de patience, les phares du petit véhicule s’allumèrent. Nous avons félicité les enfants. Il restait à régler en finesse la poussée du véhicule. Seul Lokhaïl paraissait comprendre son fonctionnement et son pilotage, chose qui nous stupéfia tous.

Le générateur à répulsion magnétique émit un vrombissement léger. Les autres clones laissèrent le petit alien à son affaire et se contentèrent de brosser la poussière sur les flancs de la plateforme.

 

En soirée, le véhicule était prêt. Le timide Lokhaïl le fit tournoyer devant nos yeux ravis à plusieurs reprises, pour nous prouver la sûreté de l’engin.

Nous avons passé une nuit heureuse, ranimés par cet espoir.

 

Le matin venu, il fut décidé que le blessé monterait à bord, ainsi que les plus jeunes et les plus âgés. Giorgio nous remercia tous. Le fait de demeurer immobile permettrait à sa jambe de cicatriser comme il faut.

Nous avons chargé les bagages et avons marché à côté du véhicule. Cette progression fut beaucoup plus rapide et bien plus agréable. Débarrassés du poids de nos sacs, nous bondissions agilement au dessus des rochers. De même, il n’était plus nécessaire de porter les enfants comme auparavant.  

 

Un Panresu très dépité se mit à trainer l’allure. Le vieil alien obstiné était à bout de forces. Nous lui avons proposé naturellement de monter à bord de la petite plateforme.

  • Un petit gris pour piloter un véhicule minier ! a t-il ronchonné
  • Lui très bon pilote, assura mon petit Stency avec candeur. Toi pas avoir peur !

Une tempête de rires salua cette charmante déclaration. Finalement, Panresu monta à bord. Effectivement, Lokhaïl excellait à diriger le petit transport, enfilant les virages avec célérité, revenant nous faire un compte rendu détaillé des lieux que nous allions traverser. Cela nous permit d’ajuster au mieux nos provisions en eau, car il était des stratifications rocheuses où nulle eau ne se déversait.

 

Après cette journée, le soir venu, j’aidais mon petit compagnon à descendre, tant il était exténué. Je l’embrassais.

  • Tu es un très bon petit, merci à toi, lui dis-je. Tu es le gris qui fait toute la différence !  

Lokhaïl prit une belle teinte argentée, ce qui était sa manière à lui de rougir.

  • Merci cher petit cœur, ajouta Eratsu. Pardon d’avoir douté de toi.
  • Toi excellent mécanicien ! souligna Stency
  • Et très habile pilote, déclara la radieuse apparition qui accompagnait le premier absent
  • Promis à un grand avenir, fit le sage d’un petit air amusé, une lueur un peu folle dans les yeux

Chacun se tourna vers Panresu, qui avait bénéficié du transport tout l’après midi.

  • Je suis un alien épargné par les signes de l’âge, mais l’arthrite me guette. Merci à toi d’avoir œuvré à réparer ce véhicule et de si bien le manœuvrer en ce lieu étonnant, dit finalement le vieil alien colérique d’une voix étonnamment calme

Nous avons tous ri de cette agréable déclaration. Notre ami commençait à changer, de manière invisible. La brillance argentée du petit gris nous émerveillait. Une bien grande intelligence était à l’œuvre en ce lieu, pour restructurer les pauvres êtres dont le génome, puis la venue au monde, avaient fait l’objet de si peu de soins, de si peu d’amour. Car au final, il ne s’agissait que de cela.

 

Comment notre petit groupe allait-il coopérer pour trouver finalement la sortie vers le monde intérieur ? Nous comprenions qu’à chaque épreuve franchie avec brio, nous nous hissions un peu plus haut. Les masques de la fierté, les préjugés sur d’autres espèces, tout cela tombait. Finalement, nous ne faisions plus qu’un.

 

J’ai été ravi de conter cette histoire tout à fait agréable. Je vous envoie toute mon affection pour vous remercier de votre intérêt, du soin que vous prenez à suivre nos péripéties,

 

Le Guérisseur Lestrys

 

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F
Leçon de vie. ....
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